Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
* téléonomique
Le biologiste français Jacques Monod dans son essai Le hasard et nécessité (1970) explique les variables du logos et de la chance dans l’évolution humaine. Il postule que ceux-ci seraient des aspects complémentaires nécessaires de l’adaptation évolutive des êtres vivants à des changements drastiques, qui permettraient d’assurer leur succès reproducteur (de survie). Suivant cette logique, nous pourrions voir l’émergence d’un «scénario téléonomique», par opposition au soi-disant «scénario téléologique» forcé dans la société occidentale aujourd’hui. Le Brexit marque alors l’avancement d’un «scénario téléologique» dans lequel le but des processus créatifs a été prévu par des modèles finis qui pourraient être intermodaux ou simuler différents avenirs possibles. Ceux-ci donneraient la priorité à l’intention, le but et la prévoyance, et remplaceraient le «scénario téléonomique», marqué par des doses extrêmes de volatilité affectant particulièrement les systèmes complexes tels que le changement climatique, la détection et la prévention des épidémies, l’immigration, la Bourse, et l’organisation géopolitique du Nouvel Ordre mondial.
Une nouvelle vague réactionnaire mondiale ?
Nous serions à la veille du début d’un paysage géopolitique subissant une nouvelle vague de déstabilisation mondiale, causée par des raisons économiques, ainsi que culturelles et géopolitiques. Le long des lignes économiques, il y a bien sûr le déclin de l’économie mondiale. Le long des lignes culturelles, il y a le déclin des démocraties formelles occidentales, en raison de la culture de la corruption, le déficit démocratique aux États-Unis étant illustré par exemple dans le programme PRISM (mené par l’administration Obama), et la perte de crédibilité démocratique des innombrables gouvernements des pays de l’Ouest et dans le tiers-monde. Ensuite, on a bien sûr le facteur géopolitique, l’émergence d’une nouvelle scène géopolitique mondiale après le retour de la récurrente et endémique guerre froide entre les États-Unis et la Russie. Cette stratégie impliquerait la mise en œuvre du soft power et inclurait le Honduras, le Paraguay, l’Égypte, l’Ukraine, l’Irak, la Thaïlande et le Yémen comme paradigmes, dans le but évident de remplacer des régimes défiant les États-Unis par des régimes militaires ou autocratiques, produisant une baisse démocratique et se traduisant par une nouvelle vague réactionnaire mondiale qui atteindrait tous les continents avec une virulence particulière au Moyen-Orient (Liban, Turquie, Tunisie, Pakistan et l’Azerbaïdjan) et en Amérique latine (Brésil, Équateur, Nicaragua, Bolivie, Haïti, El Salvador, Panama et Venezuela).
Nouvelle géopolitique Inter Pares (G3)
Avant l’intervention de l’OTAN en Libye, ce qui aurait dû se produire, c’est que la Chine et la Russie auraient dû opposer leur veto lors du conseil de sécurité de l’ONU, afin que nous puissions assister à la naissance d’une alliance russo-chinoise dirigée par Poutine qui aurait mis en avant l’apparition dans le paysage géopolitique mondial de l’Union eurasienne comme une alternative économique au bloc hégémonique occidental. Néanmoins, selon Reuters, la Russie et la Chine ont conclu un contrat pétrolier stratosphérique qui est devenu l’un des plus importants dans l’histoire de l’industrie de l’énergie par la société russe Rosneft, (la plus grande compagnie pétrolière du pays), qui fournira du pétrole au géant asiatique pendant 25 ans, pour une valeur de 270 milliards de dollars (205 milliards d’euros). Cela inclut le méga-contrat signé par Gazprom et le Chinois CNPC, par lequel la Russie fournira à la Chine 38 milliards de mètres cubes de gaz naturel pour environ $400 milliards sur une durée de 30 ans, à travers le pipeline Sila Sibiri (La Force sibérienne).
Cela jetterait les bases économiques de la future Union eurasienne − qui a commencé son voyage le 1er
Janvier 2015 − comme une alternative économique et militaire à la
proposition d’Obama pour créer un partenariat trans-Pacifique (TPP par
son sigle en anglais), la pièce maîtresse des États-Unis dans leur
réaffirmation d’une politique de pouvoir économique et militaire dans la
région du Pacifique. Ceci est à regarder en contraste à une éventuelle
offensive russo-chinoise avec les autres pays des BRICS pour changer
l’étalon monétaire mondial, et remplacer le rôle du dollar comme monnaie
de réserve mondiale.
La cartographie de la nouvelle Europe
Le retour de la guerre froide endémique entre les États-Unis et la Russie a commencé ouvertement après la crise en Ukraine et les sanctions mutuelles entre l’UE et la Russie, marquant le début de la scission de la position monolithique de l’OTAN contre la Russie. Ainsi, en représailles à des sanctions imposées par l’UE en 2015, Moscou a répondu avec un embargo sur les produits alimentaires européens, qui a eu comme effet secondaire une perte estimée à 150 millions d’euros par jour, selon le chef de la Ligue du Nord et député au parlement italien, Matteo Salvini, soit un total de plus de 100 milliards. Selon l’UE elle-même, les exportations vers la Russie de l’UE en 2013 se seraient élevées à €120 milliards. En conséquence, un courant dirigé par l’Italie, la Finlande et la Hongrie a émergé en faveur de la suspension des sanctions contre la Russie, tandis qu’à l’opposé, la Pologne, la Grande-Bretagne et les pays baltes sont ceux qui poussent à poursuivre l’application de ces sanctions dans un proche avenir. Enfin, nous ne pouvons pas exclure qu’après les élections en France et en Allemagne en 2017, nous assistions à une réaffirmation tardive de la souveraineté européenne par ces deux pays promouvant un nouveau projet européen (UE à 7), composé de la France, de l’Allemagne, de la Belgique, de la Hollande, de l’Italie, du Luxembourg et de l’Autriche, le reste des pays européens périphériques (Portugal, Espagne, Irlande, Grèce, Slovénie, Malte et Chypre) gravitant dans leurs anneaux orbitaux tandis que les pays nordiques mettraient en gestation la Fédération scandinave (composé de la Norvège, du Danemark, de la Suède, de la Finlande, de la Lettonie, de l’Estonie et de la Lituanie), qui pivoterait selon les incertitudes actuelles du commerce russo-européen.
Une nouvelle crise des missiles
En septembre 2009, le président Obama, sous la pression de l’establishment ou du Deep State américain, a approuvé la mise en œuvre d’un nouveau système européen de défense anti-missile, European Phased Adaptive Approach (EPAA). C’est en fait un bouclier anti-missile avec des missiles intercepteurs, déployés sur des plates-formes mobiles, pouvant abattre des cibles dans un espace commun, sur la base de données transmises par tous les radars et les systèmes de reconnaissance opto-électronique.
Dans un premier temps, la Russie et l’OTAN avaient convenu de coopérer pour la création de boucliers anti-missile en Europe en novembre 2010 au sommet bilatéral de Lisbonne, tout comme il était vital pour Moscou que l’OTAN offre des garanties réelles que ce système ne viserait pas la Russie via un document juridiquement contraignant. Mais l’administration Obama, suivant mimétiquement l’inertie de l’administration Bush, a repoussé la Russie jusqu’à présent et a refusé de lui offrir de telles assurances par écrit. Après l’issue de la crise en Crimée et un retour à des scénarios qui rappellent la guerre froide, il était prévisible que les États-Unis décident finalement de terminer la quatrième phase du déploiement du bouclier antimissile en Europe (Euro DAM). Des installations qui devraient être visées depuis les installations de Kaliningrad, avec le nouveau missile balistique intercontinental 100 Tm ( «le tueur du bouclier antimissile américain» selon les mots du vice-premier ministre russe Dmitri Rogozine) et, selon les mots du politologue Vladimir Abramov , «la région de Kaliningrad jouera le rôle d’un pistolet sur votre tête, vous l’Europe, comme c’était le cas il y a deux décennies».
Pendant ce temps, selon la chaine RT, la Russie est en train de négocier pour installer des bases militaires à Cuba, au Venezuela, au Nicaragua, aux Seychelles et à Singapour avec l’objectif clair d’étendre la présence militaire russe, parce que, selon l’analyste Lajos Szaszdi «l’ouverture de bases extérieures est nécessaire à la dissuasion stratégique russe, à ses services de renseignements, à vérifier les accords de désarmement et à déterminer quels sont les plans du Pentagone dans le cas d’opérations ou d’interventions à l’étranger». Cela sans exclure que lors d’une récente visite de Poutine sur l’île, nous avons vu la signature d’un nouveau traité de collaboration militaire russo-cubain, (rappelant le pacte secret signé en 1960 à Moscou entre Raul Castro et Khrouchtchev), qui comprend l’installation d’une base radar sur une base abandonnée de l’armée à Lourdes, pour écouter confortablement les murmures à Washington. L’installation de missiles Iskander pourraient faire revivre la crise des missiles Kennedy-Khrouchtchev d’octobre 1962, et la signature ultérieure avec Khrouchtchev du traité d’interdiction des essais nucléaires de 1962.
Nouveau Vietnam au Moyen-Orient ?
Suite à l’approbation par le Congrès et le Sénat des États-Unis d’une déclaration préparée par le sénateur républicain Lindsey Graham et le démocrate Robert Menendez, signalant catégoriquement que «si Israël est forcé de se défendre et de prendre des mesures (contre l’Iran), les États-Unis seront là pour le soutien militaire et diplomatique», nous assistons à une pression accrue du lobby pro-israélien aux États-Unis (AIPAC) pour procéder à la déstabilisation de la Syrie et de l’Iran par des méthodes expéditives dans une phase post-Obama. Cette guerre sera un nouvel épisode local qui illustrera la récurrente et endémique guerre froide américano-russe en impliquant les deux superpuissances via leurs puissances régionales amies (Israël, l’Égypte, l’Arabie Saoudite et l’Iran), englobant l’espace géographique allant de la zone méditerranéenne (Liban, Libye et Syrie) au Yémen et à la Somalie avec l’Irak comme épicentre (rappelant la guerre du Vietnam avec Lyndon B. Johnson (1963 à 1969), et dont l’issue pourrait avoir comme effet secondaire une nouvelle donne géopolitique favorable aux États-Unis, à la grande-Bretagne et à Israël pour la mise en œuvre du Grand Israël ( «Eretz Israël»). Cela signifierait la restauration de la Déclaration Balfour (1917), qui attribuait un État d’Israël pourvu d’une grande superficie de près de 46 000 miles carrés s’étirant de la Méditerranée à l’est de l’Euphrate couvrant la Syrie, le Liban, le sud-Irak, le nord de l’Arabie Saoudite, la bande côtière de la mer Rouge et la péninsule du Sinaï en Égypte ainsi que la Jordanie [Ce n’est pas la déclaration Balfour qui se garde bien de détailler ce «foyer juif» mais le plan Oded – Yinon bien plus tard, NdT]. La Jordanie dans un tel scénario deviendrait une nouvelle Palestine, après avoir été contrainte d’accepter l’ensemble de la population palestinienne de la Cisjordanie et de Gaza actuelle forçant une diaspora massive, comme une nouvelle Nakba.
Germán Gorráiz López
Note du traducteur
Ce texte de prospective géopolitique est quelque peu iconoclaste. On pourrait suggérer de le lire avec un peu de recul, le site katehon étant très favorable à une solution eurasienne de la mondialisation. On peut cependant s'étonner du dernier chapitre au sujet d’Israël, car il y a en ce moment un fort rapprochement du gouvernement israélien vers une Russie qui semble tenir ses alliés historiques. Cette diatribe guerrière est plus habituelle du côté américain. Il s'agit en outre du premier article en Anglais de cet auteur hispanisant qui collabore avec katehon depuis début 2016.
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