samedi 6 juin 2020

Que signifie la plus faible croissance démographique de l’histoire des États-Unis pour le logement ?

Article original de Chris Hamilton, publié le 27 janvier 2020 sur le site Econimica
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr

En 2019, la croissance démographique américaine a atteint son plus faible pourcentage dans l’histoire des États-Unis, mis à part les années de pandémie de 1918/1919 (lorsque la grippe espagnole a coûté la vie à près de 700 000 Américains). La croissance annuelle de 0,5 % signifie que la population américaine a augmenté d’environ 1,55 million de personnes en 2019.

Aujourd’hui, je voulais juste me concentrer sur les implications de la faible croissance démographique sur le plus grand secteur de l’économie américaine, le logement, et en particulier les nouvelles mises en chantier. Le graphique ci-dessous montre la croissance annuelle totale de la population américaine (ligne rouge, en million), la ligne suivante est la croissance de la population américaine parmi les moins de 70 ans (ligne jaune, en million), puis les mises en chantier annuelles (ligne bleue, en million), et enfin les taux d’intérêt des fonds fédéraux fixé par la Réserve fédérale (ligne noire, %).

Prenez vraiment une minute pour comprendre ces relations… c’est vraiment important.

De 1960 à 2008, la croissance démographique annuelle (ligne rouge) a varié d’environ 1,8 à 3,5 millions par an et la grande majorité de cette croissance s’est produite parmi la population de moins de 70 ans (ligne jaune). Pendant cette période de près de cinq décennies, les mises en chantier (ligne bleue) ont varié d’environ 1 à 2 millions d’unités par an, avec de fortes variations inverses basées sur le coût de l’argent représenté par les changements du taux des fonds fédéraux (ligne noire).

Mais à partir de 2008, les mises en chantier sont tombées en dessous de 1 million d’unités et sont restées à ce niveau jusqu’en 2012, malgré le fait que le coût de l’argent (taux des fonds fédéraux) soit resté nul pendant près d’une décennie. Le NAR et d’autres suggèrent qu’il y a une pénurie de logements en raison de cette période de mises en chantier nettement inférieures à la tendance… mais si vous regardez la ligne rouge (ralentissement de la croissance totale de la population) et la ligne jaune (effondrement de la croissance de la population des moins de 70 ans), il se passe peut-être autre chose.

Les personnes âgées de plus de 70 ans ont les taux d’accession à la propriété les plus élevés, sont les moins susceptibles de contracter de nouveaux prêts et ont les taux de participation à la population active les plus faibles parmi la population adulte, soit environ 1 personne sur 10 qui travaille contre 8 sur 10 chez les personnes âgées de 50 ans. En 2019, la population des 70 ans et plus a augmenté d’environ 1,3 million de personnes. Les personnes de plus de 70 ans ne sont pas des acheteurs nets mais des vendeurs nets, car elles remboursent leur prêt hypothécaire, se réduisent en terme d’effectifs et passent à des soins gérés ou décèdent.

C’est la croissance annuelle de la population des moins de 70 ans qui stimule la demande de nouveaux logements, qui a des niveaux d’emploi élevés et la volonté de s’engager dans une dette hypothécaire à long terme. En 2019, la population des moins de 70 ans a augmenté de moins de 300 000 personnes. La décélération annuelle de plus de 90 % des acheteurs potentiels par rapport à une multiplication par dix de la croissance annuelle des personnes âgées a mis le marché du logement sens dessus dessous.

Mais l’année dernière, il y a eu presque autant de mises en chantier que d’augmentation de la population totale… ce qui ne s’était pas produit depuis 2005. Le graphique ci-dessous montre les mises en chantier annuelles en pourcentage de la croissance annuelle de la population, en inversant le taux des fonds fédéraux. La forte augmentation des mises en chantier dans un contexte de ralentissement de la croissance démographique est sans aucun doute remarquable.

Alors que la croissance annuelle totale de la population ralentit, toute la décélération concerne la population des moins de 70 ans (baisse des naissances, baisse de l’immigration) alors que la croissance de la population de plus de 70 ans continue à s’accélérer. Le graphique ci-dessous détaille les mises en chantier annuelles en tant que ratio de la croissance annuelle de la population de moins de 70 ans de 1960 à 2015. Près de 40 ans de réduction des taux d’intérêt ont permis d’atténuer la décélération des mises en chantier en pourcentage de la croissance de la population de moins de 70 ans, jusqu’à…

C’est-à-dire jusqu’à maintenant… 2018 et surtout 2019 ont vu les mises en chantier de nouveaux logements augmenter fortement tandis que la croissance de la population des moins de 70 ans a pris une autre dimension. Le résultat a été plus de quatre nouvelles mises en chantier pour chaque nouvel arrivant de moins de 70 ans aux États-Unis… comme le montre le tableau ci-dessous.

Revenez en arrière et regardez à nouveau le premier tableau. Vous remarquerez que pour l’ensemble des années 2020, la croissance démographique prévue concerne la population de plus de 70 ans et que, tant que la baisse des taux de natalité / du nombre total de naissances et le ralentissement de l’immigration se poursuivront, nous ne devrions pas nous attendre à une croissance de la population des acheteurs de logements. L’idée que l’Amérique a besoin de plus de logements semble étrange. Il est beaucoup plus optimiste de penser que les années 2020 seront marquées par une période de remplacement des logements neufs plutôt que par une croissance pure et simple… Il est plus réaliste de s’attendre à une augmentation du parc de logements existants, car les vendeurs âgés envahissent le marché en quittant ce monde [avec la vente de leur maison, NdT] et les nouvelles constructions sont rares, voire inexistantes.

Bien sûr, l’immobilier est une question locale. Au niveau micro, il est probable qu’il y aura une augmentation des stocks ruraux et, inversement, des stocks urbains de plus en plus serrés dans certaines villes. Cela est dû à un probable exode continu des jeunes adultes des zones rurales vers certains centres urbains, à la recherche d’opportunités. Quoi qu’il en soit, la situation nette reste inchangée, voire s’aggrave, car les taux de fécondité et de natalité urbains sont encore plus faibles que ceux des zones rurales. Ou encore, peut-être que la Réserve fédérale peut simplement imprimer de nouveaux acheteurs… ou ajouter l’immobilier résidentiel à son bilan déjà gonflé pour que l’Amérique puisse continuer à construire… toujours plus… pour toujours moins de monde ?

Chris Hamilton

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