mercredi 19 août 2015

La réalité économique rattrape les fantaisies du marché

Article original de Brandon Smith, publié le 7 Aout 2015 sur le site alt-market
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr 







Dans l’esprit d’une personne schizophrène, les éléments internes de la fantaisie (positifs et négatifs) sont rendu manifestes dans la psyché et projetés sur le monde réel. Souvent, les images fantasmées de l’esprit ne sont pas simplement des images pour eux. Plutôt, ce qu’ils imaginent devient inconsciemment la réalité. Leurs facultés d’observation deviennent tellement limitées, soit en raison d’une réaction à un traumatisme ou simplement d’une incapacité inhérente à faire face, qu’ils ne peuvent pas déchiffrer la différence entre réalité et fiction. Une personne pourrait continuer comme ça pendant un certain temps si tous ses besoins sont assumés par quelqu’un d’autre. Mais au moment ou le soutien se termine (et ça vient toujours), les réalités de la nécessité, sans mentionner l’offre et la demande, referont surface. On ne peut pas vivre dans un monde schizophrénique indéfiniment.





L’entrelacement actuel des économies mondiales interdépendantes et socialisées est, au fond, schizophrène. Nos marchés ne sont basés sur aucune réalité fondamentale. Il y a très peu de fondements tangibles auxquels se retenir, et cela est le cas depuis plusieurs années. Pourtant, certaines personnes pourraient faire valoir que depuis le krach des produits dérivés de l’année 2008, une grande partie du monde a continué à marcher sur l’eau et il y a eu peu d’entre nous pour s’en inquiéter.

La puissance de la fantaisie est qu’elle est auto-entretenue. Elle est alimentée le plus souvent par des espoirs mal placés et des désirs malsains ou irréalistes, et de telles choses sont obscurément et grotesquement énergisantes. Les fantaisies peuvent en effet garder les économies autour du monde fonctionnellement en vie, même quand elles sont cliniquement mortes. Mais encore une fois, il y a toujours une fin.

Les actions et les marchés des matières premières, en particulier, ont fait de la lévitation, malgré la réalité économique, rendant leur chute éventuelle de plus en plus spectaculaire. Cette chute a commencé mi-2015.

Regardons les dures vérités froides de notre situation actuelle.

Les nouveaux signaux de crise du marché sont générés tous les deux à quatre semaines alors que nous les  passons à la moulinette pour le troisième trimestre. Ceci est en contraste frappant avec le comportement relativement prévisible et stable des marchés de ces trois dernières années. Je me rends compte que nous vivons une ébullition lente et que beaucoup de gens peuvent même ne pas se rendre compte de l’augmentation exponentielle des signaux économiques négatifs, mais vraiment, pensez y – au début de 2014, quel était le sentiment général financier par rapport à aujourd’hui?

L’Europe vient de frôler la correctionnelle avec la crise grecque, une crise qui n’est pas encore terminée et pourrait finir dans le chaos alors que l’accord de dernière minute avec la Banque centrale européenne est contesté par l’intervention du Fonds monétaire international.

Gardez à l’esprit que l’Europe est submergée par la dette avec l’effondrement des pays périphériques à sa frontière et que les nations centrales comme la France flottent dans un air de récession, qu’elles refusent de reconnaître ouvertement.

L’Asie est le point chaud du moment, avec les marchés chinois littéralement en chute libre, malgré toutes les tentatives par le gouvernement communiste pour réprimer la vente d’action à découvert, au point de menacer d’arrestation et d’emprisonnement certains vendeurs nets à découvert.

La bourse de Shanghai en Chine a connu une baisse de 30% en valeur de marché dans un délai d’un mois. L’argument courant destiné à marginaliser ce fait est que moins de 2% des actions de la Chine sont détenues par des investisseurs étrangers ; par conséquent, un accident ne nous affecterait pas ici. Ceci est, bien sûr, de l’idiotie pure.

La Chine est le plus grand importateur / exportateur dans le monde; et elle est en passe de devenir la plus grande économie du monde au cours des deux prochaines années, dépassant celle des États-Unis. L’économie de la Chine est une économie de production, et la nation est le fournisseur principal pour tous les biens de consommation partout dans le monde. Ainsi, la Chine est un test décisif pour la santé financière du reste du monde. Lorsque les entreprises chinoises sont en difficulté, lorsque les exportateurs voient une baisse globale et régulière et quand la fabrication commence à se traîner, ce n’est pas seulement un reflet de l’instabilité économique de la Chine, mais c’est aussi le reflet de l’effondrement de la demande dans tous les autres pays qui achètent auprès de la Chine.

L’effondrement de la demande signifie l’effondrement des ventes et l’effondrement des valeurs de marché. Pour un système économique mondial tributaire d’une consommation toujours croissante, ceci sonne le glas.
Aux États-Unis, les marchés ont connu une réaction retardée , en grande partie grâce à des injections constantes de la Réserve fédérale en carburant sous forme de liquidités depuis que la crise du crédit a commencé. Ce genre de soutien artificiel des marchés est devenu une partie attendue et essentielle de la psychologie du marché, générant une totale dépendance envers l’argent facile siphonné dans les grandes banques qui l’utilisent ensuite pour renforcer les actions par le biais de rachats d’actions massives (entre autres méthodes). Maintenant, cependant, l’assouplissement quantitatif a été arrêté et la politique de taux d’intérêt à zéro arrive presque à terme. L’escroquerie des rachats d’actions est presque finie.

Déjà, les marchés d’actions américains commencent à sentir la douleur de la réalité qui grignote lentement les gains. Il y a une bonne raison à cela : les salaires sont en baisse constante ; la fabrication est en baisse constante ; les ventes au détail sont en baisse, mais les dettes gouvernementales et personnelles continuent d’augmenter. Nous ne sommes pas à l’abri du chaos financier dans d’autres pays justement parce que nous avons été mis sur les rails d’un système économique mondial fortement interdépendant. En fait, beaucoup des incertitudes financières internationales sont directement liées à la chute de la consommation américaine qui était comme une pompe à cash fiable et un moteur économique.

Alors, où tout cela nous mène-t-il ?

Les matières premières racontent une partie de l’histoire, avec le prix du pétrole en glissement constant, signalisant ce que nous, dans la communauté économique alternative disons depuis des années : la relance avec des liquidités a fait caler les marchés (y compris les marchés de l’énergie) qui aurait dû être autorisé à se dégonfler il y a longtemps, et maintenant nous allons en subir les conséquences. Les prix du pétrole brut ont chuté de 19% pour le seul mois de juillet alors que les sociétés d’énergie dans le monde entier s’activent pour s’adapter. Le prix de l’or et de l’argent, en fait leur valeur papier, a baissé de façon considérable tandis que les achats physiques continuent de monter en flèche, ce qui signifie que le prix des métaux, dans la rue, pourrait bientôt être découplé du prix des marchés illégitimes et manipulés.

Certaines économies plus petites ou moyennes continueront de surprendre les marchés avec des problèmes de volatilité de la dette, comme Porto-Rico (approchant un possible défaut) et le Venezuela (approchant une mort certaine). Ce sont des canaris supplémentaires dans une mine de charbon, qu’il faut surveiller attentivement.

Il est également important de garder à l’esprit que les prix sur les produits de base comme la nourriture et le logement restent élevés malgré une déflation dans d’autres domaines (comme les salaires). Cela donne à penser que nous sommes au milieu d’un environnement fiscal stagflationniste.

La centralisation est la clé de tout le développement économique unique que nous avons vu depuis le krach de 2008. Le Venezuela, en particulier, est un marqueur pour savoir où nous allons tous : le contrôle total des prix, la confiscation de la nourriture dans les fermes, le rationnement et les cartes de rationnement informatisées afin de contrecarrer toute tentative par les citoyens de stocker l’essentiel. Ne présumez pas que de telles mesures draconiennes sont limitées aux enfers socialistes du tiers monde. Ou, à tout le moins, ne présumez pas qu’un pays comme les États-Unis ne soit pas sur le point de devenir un enfer du tiers-monde.

Quant à l’Europe, le président français François Hollande a appelé ouvertement à un système centralisé de gouvernement de la zone euro, afin de faire face à la crise économique actuelle (c’est quelque chose sur lequel je vous ai mis en garde depuis plusieurs années). Le gouvernement supranational est une fin de partie pour une humanité souveraine, et l’UE est sur la voie rapide pour le réaliser.

En Chine, la marche continue vers l’inclusion du yuan dans le panier de monnaies des DTS du FMI, le plus grand système de centralisation économique de tous les temps. La récente suggestion par des gens du FMI de retarder cette inclusion jusqu’en 2016 ne fait que renforcer la probabilité que le yuan sera ajouté au panier. Si le FMI n’avait pas l’intention de faire rentrer la Chine dans la bergerie, ils auraient suggéré un délai de 5 ans comme ils l’ont fait en 2010. Pour ceux qui pensent que la récente crise des marchés en Chine viendrait en quelque sorte contrecarrer l’inclusion du yuan dans le DTS, détrompez-vous. Le FMI a déjà annoncé que l’état des marchés en Chine n’aura aucune incidence sur la conférence sur les DTS, qui est fixée à la fin de novembre.

Aux États-Unis, les marchés attendent les hausses de taux de la Réserve fédérale. La question de la hausse des taux est sous-estimée par certains analystes, qui semblent penser que les hausses initiales seront mineures et se traduiront par peu ou pas de répercussions. Les taux d’intérêt n’affectent pas seulement quelques prêts bancaires ; ils sont le premier pilier soutenant la psychologie du marché actuel. Il n’y a pas d’autre élément financier donnant une influence positive à la psychologie des investisseurs. Il n’y a pas de bonnes nouvelles économiques pour justifier le marché haussier de ces dernières années. Il n’y a aucune forme discutée ouvertement de QE (et un futur QE semble peu probable car ces stimuli renouvelés serait un aveu que les trois premières tentatives de QE ont lamentablement échoué, empêchant toute nouvelle forme d’assouplissement). Il n’y a aucune retour à la normale. Et quand toute bonne nouvelle, même mineure ou fabriquée, est présentée dans les médias dominants, les marchés ont réagi négativement, de peur que cela hâte l’augmentation des taux d’intérêt.

Au-delà de la psychologie et des faux espoirs, les augmentations, même mineures, des taux d’intérêt vont essentiellement tuer le système de prêts bancaires à grande échelle. Nous savons grâce aux quelques audits des plans de sauvetage TARP que des milliers de milliards de monnaie fiduciaire ont été créés simplement pour nourrir les banques et les sociétés internationales à travers le ZIRP et que ce genre de prêt d’argent gratuit a été un pilier de la financiarisation depuis. ZIRP est le principal moteur de rachats d’actions et du marché d’actions haussier. Mais cela ne se poursuivra que tant que les prêts de la Fed resteront gratuits (ou presque gratuits). Des milliers de milliards de prêts peuvent générer des milliards en intérêt, même avec une hausse mineure des taux, ce qui signifie, avec la fin des ZIRP et de l’argent gratuit, que les banques et les sociétés vont cesser d’emprunter, que les rachats d’actions vont s’évaporer et que les actions vont perdre le soutien artificiel dont elles ont joui jusqu’à présent.

Même les traditionnels soutiens de la presse financière commencent à se demander pourquoi la Fed devrait pousser pour des hausses de taux et prétendre que le système financier américain est en convalescence, alors que toutes les autres informations conduiraient une personne rationnelle à la conclusion contraire. Je tiens à souligner que dans le but de comprendre les planificateurs centraux et les motivations mondialistes, vous devez regarder ce qu’ils chassent.

Le travail de la Fed est de détruire l’économie américaine et le dollar, pas de les sauver. Cela explique pourquoi la Fed continue de nier la tourmente économique et fonce à corps perdu dans un scénario de hausse des taux, même si personne dans les médias ne le leur a demandé. Le travail de la banque centrale chinoise est de prendre toutes les dispositions pour l’inclusion du yuan dans les DTS, malgré le fait que la Chine est soi-disant en conflit avec les banques occidentales. La BCE et l’Europe sont obsédés par un gouvernement centralisé, même si elles doivent casser plusieurs œufs pour l’obtenir. Et le FMI et la Banque des règlements internationaux sont programmés pour être les héros économiques de la journée, nous avertissant tous (mais trop tard, bien sûr) de la chute potentielle des politiques de relance des banques centrales et des obligations d’état.

Dans le monde trouble des fantaisies du marché, nos premiers repères sont les fondamentaux eux-mêmes. L’offre et la demande peuvent être présentées pour un temps par des statistiques manipulées, mais les effets tangibles du déclin ne peuvent pas l’être. Nos repères secondaires sont les chemins des internationalistes et des banques centrales tracés au bulldozer à travers la forêt budgétaire. Pour toute personne ayant un sens critique, la fin de partie est claire : la centralisation totale est le but, et la peur économique est l’outil qu’ils espèrent utiliser pour y arriver. J’ai écrit à de nombreuses reprises sur cette menace dans les articles précédents ; mais la première et la plus importante action est pour chacun de nous de reconnaître, de tout cœur, que le système que nous connaissons se termine. C’est fini. Ce qui va remplacer ce système dépend soit de nous soit d’eux. Ce n’est qu’en admettant qu’il y a une fin à la fantaisie, une fin douloureuse, que nous serons en mesure d’aider à déterminer notre future réalité.

Brandon Smith

Liens

Un large survol de notre discours sur les marchés par Le Blog A Lupus

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