mardi 26 septembre 2017

Les S-400 de la Russie protégeront la Turquie d’une force aérienne kurde

Article original de Andrew Korybko, publié le 18 septembre 2017 sur le site Oriental Review
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr


Putin Erdogan

Beaucoup de gens pensaient que ce jour ne viendrait jamais, mais c’est officiel : le président russe, Poutine, vendra ses missiles S-400 à son voisin turc, membre de l’OTAN, et il n’y a rien que les États-Unis ou l’OTAN puissent faire à ce sujet. Il s’agit d’un pivot géo-militaire profond pour la Turquie, car il consolide le rôle de la Russie en tant que partenaire stratégique de haut niveau du pays pour les décennies à venir, compte tenu du fait que les experts russes seront invités à fournir de la maintenance, des réparations, des pièces détachées et des améliorations à ces systèmes anti-aériens. Ce pivot n’est pas sorti de nulle part, car il suit une série de mouvements rapides que le président Erdogan a fait depuis l’échec du coup d’État pro-américain contre lui l’été dernier pour éloigner son pays de la dépendance unipolaire occidentale avec de nouveaux partenaires multipolaires à l’Est comme la Russie, la Chine et l’Iran.



Ankara a, depuis. aligné en grande partie ses politiques au Moyen-Orient avec ces trois grandes puissances, en particulier en ce qui concerne la Syrie; et même si la Turquie n’a pas officiellement renoncé à son slogan « Assad doit partir », il est presque certain que le président Erdogan reconnaît tacitement la réalité, c’est-à-dire que le président Assad ne sera pas renversé par les soi-disant « rebelles modérés ». En outre, il semble beaucoup plus préoccupé par la menace kurde croissante le long de la périphérie sud de son pays alors que son ancien « allié » américain avance dans son projet de sculpter un « deuxième Israël » géopolitique, un Kurdistan créé depuis des territoires pris à la Syrie et l’Irak. C’est ce développement, plus que tout autre chose, qui oblige la Turquie à coopérer encore plus étroitement avec la Russie, et il est très possible que le rythme accéléré de la vente des S-400 soit dû au danger imminent représenté par ce qui pourrait bientôt devenir une « force aérienne kurde » américaine et israélienne qui opérerait au nord de la Syrie et en Irak.

Il faut se rappeler que les États-Unis perdent progressivement leur vieille position hégémonique au Moyen-Orient, en particulier dans certaines parties du Golfe et surtout en Turquie, et il faut donc s’adapter à la nouvelle situation géostratégique depuis le début de l’opération anti-terroriste de la Russie en Syrie, il y a presque exactement deux ans. Il y a eu des conversations depuis le coup d’État raté de l’an dernier contre le président Erdogan. Les États-Unis pourraient perdre leur accès à la base d’Incirlik dans le sud de la Turquie et certains Kurdes syriens PYD-YPG seraient plus que disposés à inviter les USA dans la soi-disant « Rojava ». En outre, un « Kurdistan » indépendant de facto dans le nord de la Syrie et de l’Irak encouragerait naturellement la violence séparatiste du PKK dans les régions du sud-est de la Turquie, et si les Kurdes devaient recevoir ou acheter des avions vendus par les États-Unis et « Israël » pour une prétendue lutte « anti-terroriste », il est prévisible que ces actifs puissent être alors utilisés contre l’armée turque.

Après tout, il est très peu probable que la Turquie risque ses relations avec les États-Unis pour acheter des missiles russes anti-aériens uniquement pour se prémunir contre les menaces inexistantes des États voisins que sont la Géorgie,  l’Arménie, l’Iran, l’Irak, la Syrie,  Chypre, la Grèce et la Bulgarie. Il est plus probable, alors, qu’il a choisi d’aller de l’avant parce qu’il a déjà accepté que ses liens avec les États-Unis sont irrémédiablement ruinés depuis l’échec de la tentative de coup d’État pro-américain de l’an dernier et que son ancien « allié » américain travaille activement pour effacer le pays de la carte en soutenant la montée en puissance régionale d’un soi-disant « Kurdistan », complété, comme il se pourrait même, de sa propre « force aérienne » en Syrie et en Irak pour aider ses compatriotes avec des frappes anti-turques.

Andrew Korybko

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