vendredi 18 octobre 2019

La Fed a créé la Bulle de Tout et une crise de liquidité. Et maintenant ?

Article original de Brandon Smith, publié le 25 septembre 2019 sur le site alt-market.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr




C’est une dynamique intéressante que la Réserve fédérale a évoquée dans la décennie qui a suivi la crise du crédit de 2008. Ils ont passé plusieurs années à utiliser des mesures de relance artificielles pour gonfler peut-être la plus grande bulle financière de l’histoire des États-Unis, et il y a quelques années, quelque chose a changé. Ils ont rendu les marchés et les investisseurs accros à l’argent facile pour ensuite couper le flux de l’héroïne monétaire. Le système était tellement dépendant de la « China White » [Jeu de mot avec la couleur de l’héroïne, NdT] de la Fed qu’il a suffit d’une hausse des taux d’intérêt jusqu’au taux neutre de l’inflation et d’une liquidation modérée de son bilan pour que tout le monde soit secoué. Maintenant, le système meurt de ce choc et il est trop tard pour que le stimulus intraveineux puisse le sauver.



Pour beaucoup, cela peut sembler sans précédent, mais c’est plutôt courant. La Fed a une longue histoire de gonflement des bulles à l’aide de liquidités faciles, puis d’implosion de ces bulles avec le resserrement du crédit. Elle a aussi une longue histoire de prétendre qu’elle essaie de sauver l’économie de la crise alors qu’elle en est en fait la source. Comme l’a prévenu le député Charles Lindbergh Sr. après la panique de 1920 :
En vertu du Federal Reserve Act, les paniques sont créées scientifiquement ; la panique actuelle est la première panique créée scientifiquement, élaborée comme nous penserions un problème mathématique…
Dans les dernières opérations théâtrales de la Fed, une nouvelle tendance est apparue : la « Fed est décevante ». Pour comprendre cette déception, il faut définir exactement ce que les marchés attendent de la banque centrale. Évidemment, ils veulent un QE4 ; un programme massif de liquidités. Depuis au moins un an, ils réclament cette mesure, et ils ne l’ont toujours pas obtenue. Mais qu’est-ce qu’implique un QE4 ? Afin d’instituer un nouveau marathon de QE, la Fed devrait :
  • Abaisser le taux des fonds fédéraux à zéro.
  • Abaisser le taux des prises en pension à un jour à zéro.
  • Arrêter les réductions de bilan.
  • Lancer des achats d’actifs permanents, PAS seulement des prêts à 24 heures garantis par des collatéraux.
Si la Fed avait l’intention de continuer sur le chemin de l’effondrement de la Bulle de Tout, elle aurait pris toutes ces mesures et elle l’aurait fait il y a au moins 6-8 mois. Jusqu’à présent, une seule de ces mesures a été prise (la fin des réductions de bilan). Ici, nous voyons pourquoi le monde économique officiel est continuellement sur le point d’avoir une crise de conscience. L’implosion de la bulle financière devient évidente, la plupart des grandes institutions financières et des banques sont mises à rude épreuve par les niveaux historiques d’endettement et les liquidités en dollars sont devenues si serrées à l’échelle globale que les taux des prêts interbancaires montent en flèche bien au-dessus des taux d’intérêt fixés par la Fed. Pourtant, après chaque réunion de la Fed, la banque centrale donne au monde de l’investissement une réponse sans équivoque.

Voici la question que les gens devraient se poser, mais presque personne ne le fait :  Pourquoi ? Pourquoi la Fed n’a-t-elle pas ouvert les vannes du QE4 en novembre/décembre alors qu’il était évident qu’une crise de liquidité se formait ? Pourquoi la Fed a-t-elle relevé les taux d’intérêt et réduit son bilan ? La seule chose que cela a permis, c’est de déclencher les conditions d’un crash.
Ah, mais n’y a-t-il pas là une clé pour répondre à notre énigme….
Depuis le mois de novembre de l’année dernière, la Fed s’est engagée dans un schéma assez cohérent dans lequel elle fait le strict minimum pour donner l’impression qu’elle entend soutenir les marchés et désamorcer toute crise tout en ne faisant rien de concret. Il arrive un moment où il devient impossible de continuer sans ouvrir la boîte de Pandore de l’effondrement économique, et je crois que nous en sommes maintenant arrivés à ce point si on regarde les faits. Comme je l’ai noté dans des articles précédents, la Fed ne relâchera pas le nœud coulant sur la liquidité jusqu’à ce que le crash commence à frapper la conscience du grand public. En d’autres termes, la Fed ne lancera pas de QE4 tant que nous ne serons pas sur le point de vivre un autre « Moment Lehman ». Ce temps est presque venu.

Aujourd’hui, près de la moitié de tous les Américains s’inquiètent d’une récession qui frapperait l’année prochaine, et 38 % des gestionnaires de fonds s’attendent à une récession l’année prochaine. Le grand public est de plus en plus conscient de la menace, mais beaucoup croient encore que la Fed et le gouvernement agiront pour atténuer les dommages.

La crise de liquidité qui se forme dans les crédits au jour le jour et l’accélération de la « panique autour des pensions de titres » est un signe que les conditions de crash sont sur le point de s’installer sur le marché principal. Le crédit dit Repo est un mécanisme de la Fed pour augmenter le flux de crédit au sein du système bancaire (hypothétiquement). Les taux d’intérêt dit Repo sont les taux d’intérêt que les banques et autres institutions se facturent mutuellement pour emprunter de l’argent comptant. Habituellement, les taux d’intérêt des pensions de titres suivent les taux des prêts à un jour fixés par la Fed, ainsi que le taux des fonds fédéraux. Mais récemment, les taux interbancaires ont grimpé bien au-delà du niveau que la Fed a fixé.

Pourquoi est-ce important ? Parce que cela signifie qu’il y a une pénurie de l’offre et de la demande. Plusieurs banques et sociétés ont besoin d’emprunter de l’argent à court terme pour poursuivre leurs activités. C’est logique : les entreprises américaines sont actuellement plus endettées qu’elles ne l’étaient avant le krach de 2008. Le problème, c’est que personne ne veut leur prêter cet argent maintenant. Il y a globalement une pénurie de dollars et de crédit, et la demande fait monter les taux en flèche. Plus les taux sont élevés, plus l’emprunt est coûteux pour TOUT LE MONDE, y compris les petites entreprises.

La confusion a éclaté quant aux raisons pour lesquelles les banques et les entreprises disposant d’importantes réserves de liquidités ne prêtent pas cet argent, même à des taux d’intérêt élevés en raison d’une flambée de panique. L’entreprise de Warren Buffet, Berkshire Hathaway, par exemple, détient un montant record de 122 milliards de dollars en espèces. Qu’est-ce que Berkshire et d’autres compagnies ayant beaucoup de fonds savent que nous ne savons pas ? En général, les entreprises accumulent des liquidités lorsqu’elles s’attendent à une crise économique et, d’une certaine façon, cette accumulation de liquidités peut en fait contribuer à un effondrement exponentiel du crédit. C’est ce qui se produit lorsque l’élément vital de votre économie est fondé sur l’endettement lié à la demande.

Sans plus personne disposé à prêter aux taux interbancaires actuels, le prêteur en dernier ressort est la Fed, mais la réponse de la Fed a été nettement insuffisante pour la plupart des investisseurs.

Certains voient les achats de la Fed pour les prêts dit Repo au jour le jour comme un signe que la Fed va bientôt intervenir avec un QE. Certaines personnes croient même que les dépenses au titre des pensions de titres sont une forme d’assouplissement quantitatif. Malheureusement, comme pour la plupart des activités de la Fed, tout n’est pas ce qu’il semble être et la situation des pensions de titres est suffisamment complexe pour que je ne pense pas que beaucoup de gens la comprennent. Comme un de mes lecteurs me l’a récemment demandé :
La Fed de New York a déclaré vendredi qu’elle continuerait d’offrir d’ajouter au moins 75 milliards de dollars par jour au système financier jusqu’au 10 octobre, prolongeant ainsi ses efforts pour alléger la pression sur les marchés monétaires… Selon les chiffres actuels, cela fait 20 X 75 = 1 500 milliards. S’agit-il d’une forme d’assouplissement quantitatif ? Et est-ce que ça éviterait le crash imminent… ?
Il s’agit là d’une idée fausse courante au sujet des prêts au jour le jour et des pensions livrées de la Réserve fédérale. Pour dire les choses le plus simplement possible, je peux dire que les Repo ne sont généralement pas des achats cumulatifs à long terme comme l’est un QE. Les opérations de pension sont généralement des prêts très rapides que des institutions comme les banques empruntent à la Fed tout en offrant une garantie en retour (actifs financiers sécurisés).

Les Repo créent des soldes de réserve TEMPORAIRES, qui sont remboursés et effacés. Ce qui signifie que la Fed peut offrir des pensions jusqu’au 10 octobre, mais cela n’ajoutera pas 1 500 milliards de dollars au bilan de la Fed. Au contraire, le bilan de la Fed évoluera relativement peu à mesure que celle-ci revendra les garanties qu’elle a achetées, souvent avec une décote qui alimente la banque centrale en capital supplémentaire.

Réponse : Non, les pensions ne sont pas des QE. L’assouplissement quantitatif n’est pas temporaire et n’est pas non plus fondé sur des achats de collatéraux qui sont revendus quotidiennement. De plus, comme presque tous les économistes, même dans les médias dominants, l’ont souligné, la Fed devrait instituer de VRAIES liquidités pour alléger les conditions financières difficiles, et pourtant, elle ne le fait pas. Ils appellent l’action de la Fed sur le marché Repo un « bandage », et j’ai tendance à être d’accord avec eux. La Fed maintient des conditions strictes aussi longtemps que possible. Encore une fois, ce que les gens doivent commencer à se demander, c’est « pourquoi » ?

Reuters note :
Qui plus est, une réduction du IOER n’est qu’une solution temporaire et la Fed devra trouver une solution plus permanente pour l’avenir. L’élargissement du bilan de la Fed est dans le menu des solutions possibles, et Powell a fait un effort important pour communiquer clairement que cela ne devrait pas être interprété comme un assouplissement quantitatif, c’est-à-dire comme un stimulus politique, plutôt que comme un outil technique pour augmenter la circulation monétaire.
Comme un autre de mes lecteurs l’a dit cette semaine :
J’en ai vraiment marre de voir les gens de la communauté des médias alternatif appeler les prêts repo un « QE » alors que ce n’est absolument pas un QE. Tout ce qu’ils ont à faire, c’est un peu de recherche pour comprendre que la Fed a évité le QE et qu’elle a maintenu des conditions serrées. Comme vous le dites depuis un certain temps déjà, les banquiers ont créé la bulle, maintenant ils la font éclater en limitant les liquidités. Peut-être auront-ils QE4 à l’avenir, mais seulement quand il sera trop tard pour faire quoi que ce soit contre la crise de liquidité…
Voilà qui résume à peu près le problème et les idées fausses qui circulent ces derniers temps. La Fed est bien consciente de la crise de liquidité qui s’annonce depuis un certain temps déjà. Le taux LIBOR en dollars américains a connu la plus forte hausse en dix ans au début de 2018, et la pénurie globale de dollars a été constante depuis lors. La pénurie de dollars s’accompagne d’une demande accrue de la part des banques du monde entier pour des titres d’emprunt à court terme à coût élevé – d’où la montée en flèche des taux des prises en pension.
Pendant plusieurs années, la Fed n’a pas hésité à injecter de grandes quantités de monnaie fiduciaire dans le système bancaire ; pourquoi pas maintenant ? Et pourquoi ne sommes-nous pas encore en plein QE4 ?

Un facteur surprenant dans les prêts interbancaires à court terme est qu’à mesure que les taux Repo augmentent, ils peuvent en fait annuler les effets des mesures de relance de la Fed. La Fed devrait augmenter considérablement son niveau d’achats pour surpasser l’explosion des taux. Ils ne l’ont pas fait, et c’est pourquoi leur réaction aux opérations de pension n’a guère contribué à enrayer la volatilité des prêts interbancaires.

Pour mettre en perspective la réaction de la Fed en matière de pensions de titres pour ceux qui veulent traiter les prêts à un jour comme étant cumulatifs, la vérification du programme TARP à elle seule montre que la Fed a injecté environ 16 000 milliards de dollars dans l’économie globale, dont une bonne partie sous forme de prêts à un jour. Ce chiffre ne tient même pas compte des programmes d’assouplissement quantitatif de la Fed après le TARP. L’activité actuelle sur le marché Repo de la Fed n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan en comparaison.
J’affirme que la Fed maintient délibérément la crise de liquidité tout en essayant de faire croire qu’elle « agit ». La Fed crée des bulles, puis les fait éclater en resserrant les liquidités et en affaiblissant l’économie. Lorsqu’ils assouplissent les conditions de crédit, c’est presque toujours bien après que l’avalanche a déjà commencé.

Ils ont fait la même chose au début de la Crise de 1929, provoquant une expansion plutôt qu’un recul du krach, comme Ben Bernanke l’a admis publiquement en 2002. Ils ont également gardé caché les conditions de crash sur les marchés du crédit quand Alan Greenspan a mis fin à toute information vers le public sur la bulle immobilière. Et, aujourd’hui, la Fed continue de prétendre frauduleusement que l’économie américaine est forte et en reprise, et a même licencié Simon Potter, le fonctionnaire le plus capable pour gérer une crise de crédit Repo – ce même fonctionnaire qui a averti la Fed que la réponse est fondamentalement trop peu et trop tard.

La Fed ne peut même pas prétendre qu’elle « n’avait aucune idée » de ce qui allait se passer. Jérôme Powell, aujourd’hui président de la Fed, a mis en garde contre ces mêmes conséquences si la Fed resserrait les liquidités en 2012. Mais, bien sûr, très peu de gens dans le public sont au courant de cela, et ceux que la Fed et les médias blâmeront pour le crash seront ceux que la majorité du public blâmeront.

Je ne pense pas que ce soit une coïncidence si le crash de la bulle de Tout s’accélère au moment même où le chaos géopolitique éclate. Nous avons une guerre commerciale qui a peu de chances de se terminer, avec une réunion américano-chinoise en octobre qui produira probablement peu ou pas de résultats. Nous avons le cirque du Brexit qui est censé se produire en octobre. Nous traversons une crise avec l’Iran alors que les États-Unis sont sur le point d’envoyer des troupes en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis au cours du mois prochain. Et maintenant, nous avons un cirque sur une « enquête de destitution » qui éclate autour de Trump, de Joe Biden et de l’Ukraine. C’est beaucoup de distractions pour le grand public alors que l’économie s’effondre autour d’eux…

Pour comprendre pourquoi la Fed a délibérément créé une crise économique, je suggère de lire mon article sur la fin du jeu économique. Il est important de comprendre que la Fed n’a pas « perdu le contrôle » de la situation et qu’elle n’est pas non plus l’institution maladroite et stupide que certains analystes alternatifs prétendent qu’elle est. Au contraire, la Fed est parfaitement consciente des dommages qu’elle cause, et elle est parfaitement consciente à quel point ce chaos profitera à certaines organisations globalistes.

Brandon Smith

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