Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
« Les marchés ont haussé les épaules quelques jours seulement après le vote du Brexit. Ils ont haussé les épaules en une seule journée après Donald Trump. Ils ont haussé les épaules en quelques heures après le résultat du référendum italien. Du coup, sur cette dynamique, ils devraient hausser les épaules à une invasion extraterrestre de la planète Terre. » – Albert Edwards, Société GénéraleÀ cette époque de l’année, seul le cœur le plus dur et le plus froid peut échouer à montrer de la bonne volonté à ses semblables. Cela dit, l’orbe argenté de la lune de miel post-électorale de Donald Trump pourrait finir plus tôt que prévu alors que Mme Yellen se prépare à envoyer son pétard des taux d’intérêt cette semaine. Même un modeste sursaut des taux de la Fed est susceptible de détruire l’orgie de rachats d’actions d’entreprises alimentant le marché haussier depuis huit ans, dont beaucoup d’observateurs, autrefois sains, pensent qu’elle est une caractéristique permanente de la condition humaine. Le marché obligataire haussier a également semblé durer toute une vie et cela va aussi bientôt se terminer.
Le pauvre ego de mammouth de Trump l’a conduit par le museau dans un piège mortel. Les électeurs et les fans de Trumpublicain s’attendent à un autre réveil miraculeux de l’Amérique. Désolé, j’y étais, je l’ai vécu, c’était alors, c’est maintenant. Les conditions étaient tout à fait différentes en 1981. Pour une raison : une décennie après le pic soudain de la production pétrolière américaine des années 1970, les champs North Slope de l’Alaska sont entrés en pleine expansion, de même que les champs de la mer du Nord et de Sibérie.
La bonanza de l’Alaska n’a pas relancé la production américaine aux niveaux de 1970, mais elle a retiré l’effet de levier de l’OPEP et a ramené le prix élevé par baril à des niveaux que l’économie industrielle pouvait tolérer. Le reste du miracle Reagan a été accompli avec de la dette. L’affaire a été similaire pour Mme Thatcher au Royaume-Uni. Elle n’était pas une magicienne de l’économie, seulement la bénéficiaire d’un bref boom pétrolier qui a fait de la Grande-Bretagne un exportateur net d’énergie pendant deux décennies, offrant une illusion de prospérité permanente et couvrant la financiarisation de l’économie. Maintenant, avec le pétrole de la mer du Nord qui se termine, il ne reste plus que la nécromancie bancaire dans Threadneedle Street.
Reagan est également arrivé au plus fort de la guerre contre l’inflation de Paul Volker, président de la Fed, alors que les taux d’intérêt sur les bons du Trésor américain à dix ans dépassaient 15% en septembre 1981. Imaginez-vous payer 18% sur votre prêt hypothécaire ! Était-ce une bonne chose ? Et bien, ça ne l’était pas, pas du tout. C’était un très mauvais plan pendant un certain temps, mais pour Ronnie la chance, Reagan, cela a signifié que les taux d’intérêt n’avaient nulle part où aller que vers le bas. Et parce que les prix des obligations étaient corrélés à l’opposé des taux, la valeur des obligations n’avait nulle part où aller que vers le haut. C’est ce qu’ils ont fait pendant 30 années jusqu’à maintenant. Et pendant tout ce temps, le marché obligataire mondial n’en avait jamais assez – enfin jusqu’à maintenant, au moment ou de grands détenteurs comme la Chine et l’Arabie saoudite se mettent à les revomir.
Lorsque Reagan a pris le pouvoir, la dette nationale était seulement (seulement !) d’environ 500 milliards de dollars. Elle sera de plus de 20 trillions de dollars lorsque Trump accrochera son logo doré sur le portique de la Maison Blanche. Oh, d’ailleurs, pensez bien qu’1 trillion de dollars, c’est 1 millier de milliard de dollars et qu’1 milliard de dollars c’est 1 millier de million de dollars. Juste pour que vous le sachiez. Reagan avait de la place pour empiler en abondance les bricolages financiers du gouvernement. Trump n’a pas de marge de manœuvre. Bush 1, Clinton, Bush 2 et Obama ont creusé le piège mortel de la dette pour le pauvre Donald et l’élection l’a poussé dedans. Il pense qu’il est sur un étage supérieur de sa tour enchantée. En vérité, il est dans une fosse.
Trump pense qu’il va reconstruire les routes et les ponts pour un autre siècle de joyeuses virées en bagnoles – pour faire de l’Amérique celle qu’elle était en 1962 à jamais. Même pas en rêve. Le marché obligataire est prêt pour l’effondrement tandis que j’écris ces mots, et les financiers de Trump (c’est-à-dire, le gang de Goldman Sachs qu’il a rassemblé) parlent de l’émission d’obligations « Build America » à 50 et 100 ans. Leurs narines doivent être saturées de poudre de Medellin.
Ils ne vont certainement pas faire ce truc en augmentant les impôts. Sur qui ? Les sociétés ? Ha ! Le 1% ? Ha-Ha ! Tous les autres ? Fourches et cordes à nœuds !
Les compagnies pétrolières américaines ne peuvent plus se faire un dollar sur leur business. L’activité de production d’Exxon-Mobil aux États-Unis a perdu 477 millions de dollars au troisième trimestre, soit le septième trimestre consécutif dans le rouge. Pourquoi ? Parce qu’il en coûte beaucoup plus pour extraire des ressources minérales qu’il y a dix ans, et que ces coûts élevés sont en train de mettre en faillite des sociétés pétrolières et l’économie industrielle. C’est l’action furtive du Peak Oil que tant de gens prétendent ignorer. Cela finira par détruire le système bancaire.
La déception découlant de cette situation désastreuse est susceptible d’être épique comme Trump va se mettre à patauger et qu’il enverra des tweets furieux de futilité depuis le trou où il est piégé. Noël va passer et avec lui les espoirs d’un sursis. L’essence peut rester bon marché, mais les petites personnes ne seront pas en mesure d’acheter les voitures pour l’utiliser. Ou acheter beaucoup de tout autre chose. Pas même des tatouages. Nous allons bientôt découvrir la différence de tempérament entre Donald J. Trump et Franklin Delano Roosevelt.
James Howard Kunstler
Note du traducteur
Comme pour Ugo Bardi, il faut comprendre le Peak Oil comme lié à sa composante financière et non pas l'idée première de Hubbert. Pour les obligations sur 100 ans, de mémoire, le Mexique et la Belgique s'y sont déjà essayés.
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