dimanche 4 novembre 2018

Perdu dans l’espace

Article original de James Howard Kunstler, publié le 15 octobre 2018 sur le site kunstler.com 
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Jill Soloway par Ryan Pfluger pour le New York Times
 En tant que femme noire… Attendez une seconde ! Je peux écrire ça ? Eh bien, pourquoi pas. Nous sommes maintenant une nation consumée par l’illusion, dans laquelle vous pouvez déclarer tout ce que vous voulez sur vous-même et insister pour que tout le monde soit d’accord pour le dire. Si je m’identifie ainsi, vous devez me croire ! Sinon, je vous poursuivrai avec ma bande de cosplay et je vous détruirai.
 

Les avatars à la pointe de la culture veulent abolir toutes les frontières entre toutes les catégories de tout – sauf entre nous et eux : leurs alliés et leurs ennemis. Tout le reste est destiné à devenir – par la force, si nécessaire – une grande soupe turbide et sans gravité de la relativité intersectionnelle. Les raisons de cette folie punitive ne sont pas exactement ce que vous pensez qu’elles sont.

Voici un bon exemple : le profil sur le Sunday New York Times Magazine d’une certaine Jill Soloway, productrice/réalisatrice de Hollywood et maintenant mémorialiste du livre She Wants It : Desire, Power and Toppling the Patriarchy (« sorti cette semaine », notez ce petit détail.). Mx. Soloway (Mx. [ni Mr,ni Ms,ni Mrs,ni Miss] étant la nouvelle salutation intersectionnelle) dirige une société de production cinématographique nommée Topple, mieux connue pour avoir produit l’émission Transparent, qui raconte l’histoire d’un homme plus âgé qui décide qu’il serait plus heureux en se faisant passer pour une femme, avec tous les bons sentiments qu’une telle décision pourrait engendrer, si on peut dire.
Le genre était compliqué pour Mx. Soloway, pour qui la puberté est arrivée en retard, avec l’apparition soudaine de gros seins. « Les souvenirs d’autres personnes durant leur adolescence comprennent-ils des choses comme des compétitions de football ou des rubans bleus ? », écrit-il.elle « Tout ce que j’ai, c’est le souvenir d’avoir été submergé.e en devenant sexué.e devant les autres. »
Ah, la malédiction des gros seins. Quelle maladie anéantissante.
Et oui, tu l’as bien lu. Mx. Soloway insiste maintenant pour être identifié.e comme “ eux “ (The Times oblige), invoquant une galerie des glaces linguistique dans laquelle vous êtes toujours deux : celui situé dans l’espace et celui dans le miroir – devons-nous le supposer ? – ou peut-être qu’il y a une autre explication. On pourrait se moquer de la bouffonnerie narcissique de ce genre de choses toute la journée, mais ce serait fastidieux et cruel, alors je vais aller droit au but et vous dire ce qui se passe ici, de quoi il s’agit.

Il s’agit de mode, de statut et de prestige, comme c’est le cas dans les relations sociales humaines depuis que l’homme [(hu)man] préhistorique a mis une feuille de bananier sur sa tête, au grand émerveillement, et à la crainte, des autres réunis là. Ces trois conditions (mode,etc.) dépendent de la spécificité d’une personne, d’un personnage sortant du lot parmi une foule ennuyeuse, lugubre et déplorable de crétins qui acceptent d’être les otages de leur propre biologie. La biologie est une maladie à surmonter, et vous pouvez le faire en affirmant votre volonté. Par exemple, dans le cas présent de Mx. Soloway, vous pouvez vous faire opérer pour une réduction mammaire, vous couper les cheveux et porter des vêtements amples. Cela ne fait pas de vous un homme, mais cela vous permet d’affecter de renoncer à votre « assignation sexuelle ». De toute manière, qui veut être un homme ? (L’ennemi  !).

Vous prétendez plutôt exister dans un royaume liminal imaginaire entre deux-eaux, soulagé.e de toutes les tensions douloureuses d’être l’un ou l’autre, et donc, dans une certaine mesure, des tensions d’être un mammifère mature. Ce jeu du « faire semblant » n’est-il pas l’occupation principale de l’enfance, qu’elle soit heureuse ou non ? Et Hollywood n’est-il pas le jeu du simulacre ? Ainsi, à Hollywood, les plus zélé.e.s au simulacre acquièrent le plus grand prestige. Le truc, c’est de faire en sorte que les autres soient d’accord pour reconnaître que votre simulacre est de bonne foi (le stratagème des habits neufs de l’Empereur). Une façon d’y parvenir est d’élaborer une belle histoire fantaisiste, en phase avec ce qui est déjà à la mode. Avec le bon vieux puritanisme américain qui revient à la mode sous le couvert de l’autoritarisme maoïste qui émane des campus, rien n’a un statut plus élevé que celui d’anathémiser la sexualité humaine en la manipulant sous tous les angles pour l’abolir, la bannir du monde, et punir ceux qui s’y opposent.

Il y a quelques petits problèmes avec cela. Le premier est que vous collez toujours à votre sexualité biologique réelle, que vous le vouliez ou non. Chaque cellule du corps est imprimée – sauf dans de rares cas de ce que l’on appelait autrefois des « malformations congénitales ». Il n’y a pas de politique de « retour » au bureau des affectations sexuelles. Par conséquent, les personnes qui ne vont pas jusqu’à bousiller radicalement leur corps avec une amputation génitale et des traitements hormonaux radicaux sont encore l’objet d’impulsions sexuelles du type de celles associées à leur ADN cellulaire. Mx. Soloway l’a démontré dans son propre travail, comme l’explique le Times :
Après que l’auteur [Mx S.] est tombé.e amoureuse d’une lesbienne alors qu’elle.il était encore marié.e, les deux ont produit avec enthousiasme une courte comédie sur l’éjaculation féminine. L’équipe de Topple a participé à la construction d’un vagin géant et à la confection des costumes. Mx. Soloway a appellé le film, inévitablement, « Si tu le construis, elle jouira ».
L’un des principaux rôles du New York Times dans notre société a toujours été de conférer du prestige aux personnes sur lesquelles il choisit d’écrire. Le Times est un puissant moteur d’octroi de statut, enfermé dans une boucle de rétroaction avec le lectorat qu’il s’efforce de flatter afin de le placer dans la hiérarchie sociale du jour. Malheureusement, ce qu’ils doivent affronter de nos jour, c’est un effondrement culturel, et c’est exactement ce qui transforme la dégénérescence en prestige. C’est un processus peu appétissant, et ses produits – des mammifères adultes soi-disant « au genre fluide » – ont exactement cette aspect assez peu appétissante. Ce qui est le plus à la mode de nos jours est évidemment irréel, et devenir une victime de cette mode ne peut pas avoir une fin heureuse.

Too much magic : L'Amérique désenchantée 

James Howard Kunstler

Pour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.

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