mardi 10 janvier 2017

Trump est exactement là où les élites le veulent

Article original de Brandon Smith, publié le 31 Décembre 2016 sur le site alt-market.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr



La dissonance cognitive est une drogue puissante. Cela rend des gens très intelligents dans un autre contexte, maladroits et incohérents dans leur pensée et aveugles à certaines réalités qu’ils devraient normalement voir juste sous leur nez. Je suis tout le temps témoin de ce phénomène dans le domaine de l’économie, devant un élément clé de la logique, un fait majeur que certaines personnes refusent absolument de prendre en compte, simplement parce qu’elles ont une idée particulière de la façon dont le monde fonctionne et qu’elles ne peuvent pas permettre à cette idée de venir remettre ce dogme en question. Elles préfèrent se lancer dans une gymnastique mentale digne d’une médaille d’or olympique, plutôt que d’examiner la vérité. Et si vous les confrontez à cette idée, elles vous accusent VOUS d’être dans le déni.

 

C’est ainsi que nous avons fini par avoir la crise du crédit et l’effondrement des marchés en 2008/2009. C’est ainsi que très peu de gens ont vu le message de fond au sujet de la Syrie et d’ISIS et le fait que le financement et la formation des extrémistes islamiques par les gouvernements occidentaux dans le but d’une insurrection par procuration ne soit pas un concept génial. C’est la raison pour laquelle les médias dominants ont mis des années pour reconnaître l’avènement du paradigme Est / Ouest, le même paradigme contre lequel les analystes alternatifs avaient mis en garde des années à l’avance. C’est pourquoi la plupart des médias dominants ET des analystes alternatifs ont totalement écarté l’idée d’une réussite du référendum sur le Brexit. Et c’est pourquoi la grande majorité des experts ne pouvait même pas concevoir une victoire de Trump en 2016. Je pourrais écrire une liste de 20 pages sur tous les événements géopolitiques et financiers que la plupart des gens ont manqué, parce qu’ils s’accrochent à des hypothèses plutôt qu’à des preuves.
Malheureusement, le mouvement de la Liberté est aussi parfois vulnérable à de telles hypothèses. Les plus dangereuses tournent autour de la montée au firmament du président élu Donald Trump.

J’ai vu des théories sans fin au cours des derniers mois, sur toutes les façons dont les élites mondiales allaient saboter la campagne de Trump. Je crois que l’expression « ils ne lui permettront jamais de gagner » a été répétée dans presque toutes les discussions [anti-Système, NdT] sur l’élection. L’hypothèse en l’espèce était que Trump est « anti-establishment » et, par conséquent, une menace pour les globalistes. Ce sont les mêmes globalistes dont les gens ont également prétendu qu’ils allaient « voler l’élection », ou provoquer un « coup d’État » au niveau du collège électoral pour arrêter une présidence Trump.

Bien sûr, cela ne s’est jamais produit. Donc, un pourcentage important du mouvement doit se demander : pourquoi cela ne s’est-il pas produit ? Comment Trump a-t-il gagné, dans un système que nous savons truqué depuis des décennies ?

Vous entendrez des centaines de théories et de rationalisations sur la victoire miraculeuse de Trump, mais une raison que vous n’entendrez presque jamais est aussi la plus probable : Trump a gagné l’élection parce qu’il sert les intérêts de l’establishment. Trump a gagné parce qu’il est un faux nez.
Ce n’est pas une idée que de nombreux militants de la liberté veulent entendre. Ils ont été si repoussés par la proposition de voir Hillary Clinton prendre la barre de la Maison Blanche, qu’ils auraient investi dans presque N’IMPORTE QUI concourant contre elle, même s’ils pensaient que le candidat pourrait n’être qu’une opposition contrôlée. Cependant, ce n’est pas n’importe qui, qui a été mis sur le terrain en tant que candidat ; Trump a été mis sur le terrain et pour une bonne raison. J’ai prédit, avant les primaires républicaines et démocrates, que la dernière élection serait entre Trump et Clinton, dans mon article Est-ce qu’une présidence Trump va vraiment changer quelque chose en mieux ?, publié en mars, et voici une citation sur le pourquoi:
L’autre aspect ingénieux de la campagne Trump est vraiment contre qui il court – Hillary Clinton, une candidate libérale enragée, encore plus haïe que Barack Obama. Une candidate avec un casier judiciaire potentiellement sérieux et un penchant pour une vision du monde purement communiste, bien au-delà de celle de Bernie Sanders […] Ceux d’entre nous qui sommes dans le domaine de la littérature depuis longtemps et qui ont donné dans la fiction savent que pour créer un héros fantastique, vous devez d’abord mettre encore plus de travail dans la création d’un méchant fantastique. Rien n’est possible sans le méchant.
L’horreur absolue inhérente à la perspective d’une présidence de Hillary Clinton est comme d’ajouter du carburéacteur à la campagne Trump. (Et oui, je suppose, selon les résultats des primaires à ce jour, que la dernière élection sera entre Trump et Clinton.)
Mon point de vue à l’époque, ainsi que maintenant, est que sans Clinton comme contrepartie, Trump n’aurait pas recueilli l’adhésion politique suivie qui a été la sienne. Tout autre candidat démocrate n’aurait pas galvanisé les conservateurs avec tant de ferveur. Comme j’ai poursuivi dans mon article avant les primaires :
Donald Trump semble être l’antithèse parfaite d’Hillary Clinton. […] la vraie question est donc : est-ce que Trump est un reflet de la frustration et le défi de la population conservatrice, ou, est-il une ruse intelligente de l’establishment pour coopter et apaiser la population conservatrice avant que nous nous rebellions ?
La mise en scène de l’élection de 2016 aurait pu paraître à certains un chaos absolu, mais pour moi, elle n’aurait pas pu être plus parfaitement scénarisée. Dans les articles suivants couvrant l’élection, j’ai continué à donner une chance à Trump. J’ai déclaré que je ne doutais pas qu’il gagnerait les élections et que cela serait suivi d’une crise économique, probablement déclenchée au début de son premier mandat. Les mouvements conservateurs seraient utilisés comme boucs émissaires pour un crash que les globalistes auront créé. Cependant, je croyais (marginalement) possible que Trump n’ait pas conscience de cette stratégie de la part des élites. Aujourd’hui, je ne partage plus cette opinion.

Le premier et pire signe que Trump n’est pas si « anti-establishment » a été son renversement total au sujet de sa rhétorique originelle « sur le drainage du marais ». Non seulement Trump n’est pas parti pour drainer le marais de Washington D.C. et la corporation élitiste abonnée aux portes tournantes, mais il est en train d’y ajouter d’autres types de goules non moins ragoûtantes. Comme Newt Gingrich, qui se décrit comme un conseiller de Trump pour les affaires extérieures, l’a récemment déclaré :
« On m’a dit qu’il désavouait maintenant […] [Il draine le marais] Il dit maintenant que c’était pour rire et qu’il ne va finalement rien faire […] »
Il y a une bonne raison pour laquelle Trump ne veut plus utiliser ce slogan particulier – son cabinet est maintenant rempli avec les mêmes élites qu’il accusait d’être l’establishment de Washington.

Trump a d’abord placé un ancien de Goldman Sachs, Steven Mnuchin, comme secrétaire du Trésor. Goldman Sachs a une longue histoire de placement de ses anciens employés dans des positions vitales au sein des organismes gouvernementaux traitant directement de l’économie. Le cas de Mnuchin est particulièrement troublant, en raison de ses liens avec George Soros ; Mnuchin travaillait directement pour George Soros chez Soros Fund Management, jusqu’en 2004.

Alors, pour ceux qui pensaient que Mnuchin n’était qu’une anomalie, Trump a ajouté Gary Cohn, président de Goldman Sachs, en tant que directeur du Conseil économique national.

Le stratège principal de Trump et dirigeant de Breitbart, Steve Bannon, est également un ancien banquier d’investissement de Goldman Sachs.

Il est intéressant de noter que plus d’un quart des gains dans la hausse du Dow Jones après l’élection de Trump était lié à une hausse de la valeur des actions de Goldman Sachs. Tiens donc…

Trump est également désormais « conseillé » sur des questions économiques, par un copain du président de JP Morgan, Jamie Dimon. On commence à bien voir l’image d’ensemble, là.

Si cela ne suffit pas, que diriez-vous du fait que Trump est étroitement conseillé par le mondialiste de longue date Henry Kissinger (tout comme Vladimir Poutine est conseillé par Kissinger) ? Je ne sais pas pourquoi tant de gens sont surpris par cet arrangement ; Trump a rencontré Kissinger quelques mois avant les élections. Peu importe l’administration, il y a TOUJOURS un mondialiste de haut niveau derrière le rideau. Barack Obama avait Zbigniew Brzezinski, et Trump et Poutine ont Kissinger.

Je ne vais pas entrer dans le détails des nombreux républicains de l’establishment que Trump a pris dans son administration, je garde ça pour un autre article, mais n’importe qui dans le mouvement de la Liberté qui n’est pas au moins méfiant au sujet de Trump sur ce point est probablement un plaisantin. L’essentiel est que Trump a déjà menti à sa base électorale. Il s’est entouré de globalistes et de gardiens du sérail financier, alors qu’il avait tant critiqué Clinton pour le même comportement. À ce stade, tant qu’il travaillera en étroite collaboration avec de tels parasites, il n’y a aucun moyen pour nous de savoir s’il décide par lui même ou si ces gestionnaires prennent des décisions pour lui.

J’ai entendu dire que Trump « n’a pas de choix » en dehors des initiés de Washington, ce qui explique que son cabinet soit chargé de requins de Goldman Sachs. Je trouve cet argument plutôt naïf. Je dirais qu’il y a des milliers de brillants professionnels et de gens beaucoup plus dignes de confiance, à l’extérieur du Beltway, qui pourraient peupler le cabinet de Trump et « make America great again ». Je dirais même que TOUTE personne ayant peu d’expérience des magouilles du marais serait mieux adaptée pour le poste.
Il me semble qu’il y a des activistes qui ne peuvent tout simplement pas accepter l’idée que Trump était le candidat que les élites voulaient depuis le début. Après tout, les puissances n’ont-elles pas fait tout ce qui était en leur pouvoir pour essayer de l’empêcher de gagner l’élection ?

Eh bien, pas vraiment. La tempête de feu médiatique qui entoure Trump, bien que très négative sur le ton, a seulement stimulé l’exposition de Trump tout au long de l’élection. En fait, Trump a reçu plus de couverture de médias comme CNN, que tous les autres candidats réunis.

C’était exactement la tactique opposée que les médias contrôlés par les élitistes ont utilisé contre le vrai candidat libertarien Ron Paul en 2012. Avec Paul, les médias n’ont pas dérogé au silence absolu le concernant. Ils ont même refusé de montrer un seul signe de campagne de Ron Paul dans la foule, sauf s’ils ne pouvaient l’éviter. Il s’agissait d’un effort concerté, systématique de la part des médias de gauche et de droite pour s’assurer que personne, hors d’Internet, n’entende parler de Ron Paul.

Alors qu’est-ce qui s’est passé avec Trump ? Pourquoi les médias traditionnels ont-ils abandonné une stratégie qui a été si efficace contre Ron Paul et pourquoi ont-ils donné à Trump une couverture illimitée ?
Les élites n’ont pas pris de mesures très strictes pour perturber la candidature de Trump au début de la course. La Convention nationale républicaine a entrepris une campagne de désinformation et de changements de règle, afin de s’assurer que Ron Paul n’aurait aucune chance d’organiser un renversement contre le choix de Mitt Romney par l’establishment. Le même type de trahison a été utilisé par la DNC en 2016 pour saboter Bernie Sanders – sans doute un candidat beaucoup plus populaire et efficace que Hillary Clinton.

Les élites du parti ont de nombreux outils à leur disposition pour tuer les chances d’un candidat avant qu’il ou elle ne soit vraiment exposé sur la scène nationale, mais nous sommes censés croire que Trump s’est juste glissé dans les failles, ou qu’il les a battus à leur propre jeu ? Je ne pense pas.

L’élection elle-même a été criblée de fuites, au sujet de courriers électroniques et de cargaisons de données montrant la corruption de la campagne Clinton, qui ont contribué à assurer une victoire Trump. Les accusations de « piratage russe » sont clairement un détournement d’attention, mais la question reste entière, qui a alimenté cette information pour Wikileaks ? Certains pensent que des « employés mécontents » au sein de l’appareil de renseignement américain ont peut-être divulgué les données. Je pense qu’ils n’étaient pas mécontents. Je pense que la plupart des fuites faisaient partie du théâtre électoral dès le début. À la lumière de l’objectif clair de Trump de s’accoquiner avec des vampires bancaires au sein de son administration, je pense que les élites ont toujours voulu qu’il « gagne » l’élection.

Bien sûr, pour certains dans le mouvement de la Liberté, cette revendication est sacrilège. Ils ne veulent pas l’entendre, ils vont me haïr pour avoir osé le dire, et c’est très bien ainsi. J’ai commencé mon travail en 2006 pendant les années Bush, et je me souviens très bien de ce que c’était. J’ai peu de doute que certaines personnes m’accuseront d’être un « libéral » avant même de terminer cet article, tout comme les gens me traitaient de « néocon » pendant l’administration Obama. Les gens qui se sont fermement attachés aux « théories du complot » entourant l’élection et à la façon dont Clinton était « l’élue » me traitent hypocritement de « théoricien du complot » pour oser prétendre que PERSONNE ne pénètre à la Maison Blanche sans être contrôlé par les élites, même Trump.

Travailler dans des médias alternatifs signifie aussi ne pas se soucier si les gens vous aiment ou pas. J’ai pu faire de nombreuses prédictions correctes, parce que je ne me préoccupe pas des pressions pour me conformer à la pensée de groupe. Mon seul espoir est que beaucoup, dans le mouvement, réalisent plus tôt que plus tard que leur foi en Trump a été mal investie. Le grand danger, c’est que le mouvement de la Liberté, la meilleure chance pour sauver cette nation, se repose sur ses lauriers, en rassemblant tous ses espoirs et ses œufs dans le panier Trump, en attendant qu’il galope sur son cheval blanc et nous sauve tous de l’oubli. Et quand ce moment viendra, je soupçonne qu’il ne fera rien, et que le mouvement sera neutralisé par son désir désespéré d’un héros et d’une idole.

Brandon Smith

Note du traducteur

Cet article est particulièrement intéressant à plus d'un titre. Il est probablement le début d'une vague anti-Trump venant de l'aile conservatrice et des sites réellement anti-système aux États-Unis et ailleurs dans le monde, en plus de l'agitation actuelle de la gauche radicale. On va quand même attendre le 20 janvier, mais si les premières mesures ne sont pas alignées avec les thèmes de sa campagne, il ne profitera sans doute pas des 100 jours et il va se trouver très exposé, lui et ses soutiens, qui avaient sans doute prévu de passer des trains de mesures discrètement dans l'élan de l'élection.

La qualité croissante des analystes anti-système va sans doute permettre de décrypter chacun de ses pas en temps réel, dans tous les domaines et sur tous les fronts, la gestion des taux d'intérêt par la FED, le niveau des marchés, la politique d'expansion du crédit, la réalité "dévoilée" du taux de chômage, les manipulations du cours de l'or, la communication du FMI et de la Chine autour des DTS et donc les phénomènes de dédollarisation, la réalité de la fin annoncée du TPP et du TIPP, les tensions sécessionnistes en Californie, etc… Comment vont évoluer les narratives préfabriquées et leurs perceptions ? Tout cela sera très instructif et nous risquons aussi de voir certains sites anti-système déclarés, comme Breibart notamment, devenir beaucoup moins agressifs et dévoiler ce qu'ils sont peut-être, une certaine forme d'opposition contrôlée.

Il reste cependant qu'en politique extérieure, cela devrait mieux se passer si la nouvelle administration calme effectivement le jeu et accepte par exemple le règlement de la situation en Syrie par la Tripartite. Certains pays comme l'Arabie saoudite devraient se trouver en très mauvaise posture, avec une quasi-obligation de pivoter géostratégiquement, à tout vitesse. À contrario, la Chine et la Russie ont un boulevard devant elles, que Trump fasse ce qu'il a promis ou qu'il soit simplement englué dans son propre marécage.


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