Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Rappelez-vous ces longues journées de voyages pendant les vacances où la question revenait sans cesse : « Quand est-ce qu’on arrive ? ». Eh bien, pour beaucoup dans la communauté du Peak Oil, l’attente de son arrivée a suscité un sentiment similaire, car les prédictions de certains universitaires, commentateurs et blogueurs ne se sont pas concrétisées. Donc, cela vaut la peine de revisiter certains documents de réflexion qui révèlent une approche plus sophistiquée pour le calendrier du Peak. Cela peut donner aux gens une plus grande appréciation des défis à faire une prédiction pour un tel événement si complexe.
Divers modèles mathématiques ont été évoqués pour lier la production aux estimations de la quantité totale de pétrole pouvant être extraite, également appelée ressource récupérable ultime (3P). Il s’agit des modèles linéaire, exponentiel et, le plus connu, celui d’Hubbert. Des tentatives ont été faites pour déterminer le meilleur ajustement de ces modèles à la production historique. Cependant, en termes de prédiction, aucun n’est nécessairement plus correct que les autres. Les résultats qu’ils prédisent sont fortement déterminés par les hypothèses et les paramètres utilisés pour façonner les courbes résultantes.
Sans doute, la taille des ressources récupérables ultimes supposées peut avoir un effet important sur la date du pic. De même, les valeurs du taux de croissance et de déclin de la production pétrolière peuvent déterminer la symétrie de la courbe de production. Un taux plus élevé de déclin crée une courbe de production inclinée vers la droite et vice versa.
C’est avec cet esprit que les chercheurs de l’US Energy Information Administration (EIA) ont tenté d’utiliser la modélisation mathématique pour prédire une date pour un pic de la production mondiale de pétrole 1 (voir la figure 1). Par souci de simplicité, nous considérons leur analyse, et d’autres, avec une estimation moyenne des ressources récupérables ultimes de 3 000 milliards de barils. Pour un taux de croissance réaliste de 2% par an, ils ont prédit un pic en 2037. En faisant cela, ils ont supposé un ratio de réserves / production de 10 (soit un taux de déclin de 10% par an), basé sur l’historique de la production américaine.
Cependant, les hypothèses de taux de déclin des chercheurs de l’EIA ont été largement critiquées par les derniers modélistes comme étant inacceptablement élevés. C’est parce que le taux de déclin aux États-Unis qu’ils ont utilisé était basé sur des réserves prouvées et non sur les estimations plus importantes des ressources récupérables ultimes pour les États-Unis. Ces chercheurs ont affirmé que le taux de déclin dans la réalité aurait dû être beaucoup plus bas. Cela aurait, en fait, décalé la prédiction du pic estimée des années plus tôt.
Des analyses plus récentes se sont plutôt basées sur différents taux de croissance et de déclin, conduisant à une gamme de prédiction de dates pour un pic de production. Pour simplifier et pour permettre une comparaison entre celles-ci et le modèle précédent de l’EIA, nous allons garder notre hypothèse de ressources récupérables ultimes d’environ 3 000 milliards de barils et un taux de croissance d’environ 2%. Ce taux de croissance est proche de celui observé à l’échelle mondiale jusqu’à présent. Lorsque nous faisons ces hypothèses moins restrictives et que nous utilisons des taux de déclin variant de façon réaliste de 2 à 6%, nous obtenons une fourchette allant de 2019 à 2026 2 et 2013 – 2033 3 dans les deux études, respectivement (voir la figure 2).
Ces résultats jettent un éclairage différent, non seulement sur la prédiction d’un pic de production de pétrole, mais aussi sur notre capacité à prédire précisément la date. Il convient de noter que de nombreuses prévisions pétrolières précoces ont été basées sur des courbes de production symétriques où la croissance de la production et les taux de déclin étaient égaux. C’est une hypothèse de prédiction raisonnable lorsque les valeurs futures réelles de ces taux sont inconnues. Cependant, en réalité, les courbes de production sont rarement symétriques.
En ce qui concerne ces commentaires, une analyse de la Banque HSBC en 2016 a indiqué qu’en raison de la nature de la production pétrolière où les champs plus importants sont exploités en premier lieu, les taux de déclin ultérieurs peuvent être supérieurs à ceux utilisés dans la modélisation symétrique de Hubbert. Leur conclusion est qu’en fait, ils peuvent être de 6% en moyenne. Ainsi, alors qu’une prédiction pour 2037 fondée sur un taux de déclin de 10% pour des ressources récupérables ultimes à mi-consommation pourrait être plus tardive et difficile à prévoir, une prédiction avant 2020 en fonction d’un taux de déclin relativement faible pourrait être aussi plus précoce. L’une des études ci-dessus montre que sur 64 scénarios de production mondiale, 53 ont donné un pic avant 2030 4, alors nous pouvons raisonnablement avoir confiance en un pic avant cette date.
Certes, l’interprétation des études ci-dessus est une simplification, mais elle illustre quelques points. Tout d’abord, pour toute hypothèse donnée sur les ressources récupérables ultimes, il peut y avoir une large gamme de prédictions de dates de production mondiales en fonction des hypothèses de croissance et des taux de déclin qui sont retenus. Par conséquent, nous ne devrions pas nous attendre à une prédiction ponctuelle d’une date de Peak en raison des grandes incertitudes inhérentes non seulement à notre connaissance limitée des ressources récupérables ultimes, mais aussi de la production, ce qui peut affecter la date réelle en la décalant de plusieurs années.
En outre, cela explique également le grand écart de date pour le Peak pour le pétrole par différents chercheurs, organismes publics sur l’énergie et par des commentateurs informés. Ainsi, nos vacanciers impatients devront peut-être patienter un peu plus longtemps pour découvrir la réalité du Peak Oil dans un monde fini !
David Warrilow
Note du traducteur
Il est même assez probable que l'on « découvrira » le Peak seulement plusieurs années après l'avoir passé du simple fait du temps qu'il faut pour consolider des statistiques fiables.
Notes
- Wood J.H., Long G.R. and Morehouse D.F. (2004). Long-term world oil supply scenarios : the future is neither as bleak or rosy as some assert. Energy Information Administration.
- Kaufmann R.K. and Shiers L.D. Alternatives to conventional crude oil : When, how quickly, and market driven ? Ecological Economics 67: 405 – 411.
- Sorrell S., Miller R., Bentley R. and Speirs J. (2010). Oil futures : A comparison of global supply forecasts. Energy Policy 38: 4990–5003.
- Kaufmann R.K. and Shiers L.D. Alternatives to conventional crude oil : When, how quickly, and market driven ? Ecological Economics 67: 405 – 411.
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