samedi 6 mai 2017

La grande retraite de Moscou

Article original de Ugo Bardi, publié le 27 Avril 2017 sur le site CassandraLegacy
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr



Du blog Kelebek de Miguel Martinez. Publié le 25/04/2017

Miguel Martinez est né au Mexique et vit actuellement à Florence, en Italie. Il est un polymathe et un polyglotte, intéressé par l’histoire, la politique, la culture, la littérature et bien plus encore. Son blog est intitulé Kelebek, « papillon » en turc. Dans cette publication, Miguel prend la retraite des armées de Napoléon de Moscou en tant que paradigme pour les conditions actuelles de la société et de « la gauche  » en particulier. Nous sommes en retraite, mais personne ne semble s’en rendre compte et « les Grenadiers de Le Pen ne réduiront pas la distribution de bois ou de nourriture, peu importe le froid qu’il fera ». Le post est écrit d’un point de vue italien; pour le lecteur non italien, cela peut aider à savoir que Matteo Salvini (qualifié de « parachutiste » dans cet article) est le chef du parti politique italien d’extrême-droite la Lega Nord. Les phrases en gras et en italique sont dans l’original. Traduit et légèrement adapté par moi [Ugo Bardi].




 Le 14 septembre 1812, Napoléon est entré dans Moscou. C’était l’aboutissement de son Empire, qui n’avait jamais atteint une telle extension en Europe de l’Est. C’est aussi l’une des rares occasions où un chef étranger a réussi à occuper la capitale russe, un exploit qui ne sera jamais répété à l’avenir. Ainsi, tout simplement en s’étendant, Napoléon a détruit tout ce qu’il a construit et il a causé la mort par le gel de quelque 400 000 de ses soldats dévoués.

Il est difficile de trouver un meilleur exemple aujourd’hui, du destin de l’Occident.

Un commentateur du blog Kelebek, Mirkhond, écrit sur les élections françaises :
Malheureusement, l’appauvrissement croissant de secteurs de plus en plus importants de la société européenne ne contribuent certainement pas à générer de la confiance pour la gauche, qui semble ne s’inquiéter que de mariages homosexuels. Cela donne de l’espace à Le Pen et à d’autres comme elle.
C’est un genre de raisonnement diffus qui révèle, et en même temps masque, une vérité. Commençons par ce qui ne va pas, quand une personne seule se trompe. Nous pouvons dire : « Renzi n’a pas compris… ». Mais « La Gauche » est composée de millions de personnes sur un continent entier. Ils ne se trompent pas, ils sont victimes de l’histoire. Revenons à l’image de la retraite de Russie.



Essayons de le voir de cette façon.

La gauche redistribue. Elle redistribue ce que le capitalisme épuise de la nature, du reste de l’humanité et des générations futures. Ayn Rand et d’autres amateurs de destruction universelle ont écrit des critiques brillantes, sur la nature parasitaire de la gauche.

Nous ne sommes pas encore arrivés au bras de fer final, mais nous sommes déjà dans la phase de déflation de cette énorme bulle. Plus ou moins tout le monde aujourd’hui, sauf peut-être en Inde où ils doivent encore le comprendre, soutiendrait la déclaration simple : « Je pense que mon fils va vivre des temps pires que les miens. »

Bref, nous devons gérer la Retraite.

La retraite n’est pas une prophétie. Nous l’avons fait depuis des décennies (beaucoup marquent 1974 comme date décisive, mais le concept est bien plus complexe). Il n’est pas surprenant que ces temps qui arrivent soient des décennies de désorientation pour la gauche, partout dans le monde.

Maintenant, dans la retraite, il y a peu à redistribuer, à l’exception des médailles – même Napoléon avait fait graver des médailles, expressément pour se souvenir de la Retraite :



Ce n’est donc pas par hasard si l’activité principale de la gauche aujourd’hui est la redistribution des médailles. Veillez à ne pas utiliser le terme « nègre », essayez de libérer un prisonnier italien en Turquie (et combien de prisonniers tunisiens y a-t-il en Italie, pour qui personne ne dit rien?). La peur parce que sur Facebook, quelqu’un a dit quelque chose de désagréable sur quelqu’un d’autre, la fête parce qu’une multinationale recrute comme gérante une lesbienne paraplégique.

Beaucoup de gens deviennent fous sur ces sujets, comme si le problème était la fille lesbienne et non la multinationale. Ces réactions hystériques font que la gauche se sent importante et ces personnes hystériques pensent qu’elles défendent les valeurs occidentales. C’est un jeu qui rend tout le monde heureux.
Sur un ton plus grave, il y a la proposition nationaliste. Le reste du monde pourra bien battre en retraite, nous ne le ferons pas. Nous allons continuer à suivre le chemin du progrès, du développement, construire des usines, faire revivre le XXe siècle, en bref.

Les Grenadiers de Le Pen ne réduiront pas la distribution de bois ou de nourriture, quelle que soit la température qu’il fera.



Cette proposition n’est pas sans une logique certaine, du moins tant que nous continuons à croire en la croissance, le progrès et la bulle. Et puisque La Gauche ne peut pas mettre en doute ces vérités absolues, leurs réactions deviennent aussi névrotiques et irrationnelles que celles de la Droite. Mais si, au lieu de cela, nous devions douter de ces hypothèses, nous verrions immédiatement les limites des réponses données par les grenadiers de Le Pen, les parachutistes de Salvini ou les Trump’s Marines.

Ugo Bardi

Note du traducteur

... et celles des gauches sociétales, libérales et le front des multinationales ... enfin quasiment tout le monde, à part les mouvements décroissants, sans oublier toute la population occidentale qui ne veut rien entendre d'une quelconque retraite.

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