Article original de Dmitry Orlov, publié le 23 Mai 2017 sur le site Club Orlov
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
« Soufflez dans le nez d’un cheval et il va bouger sa queue »,
dit le dicton. C’est stupide, mais cela intègre un modèle de pensée
commun : faire A pour atteindre B. À mesure que nous grandissons, nous
apprenons beaucoup de tels modèles de pensée et, en tant qu’adultes,
nous nous attendons à ce qu’ils continuent à fonctionner. Nous ne savons
pas nécessairement pourquoi. Nous n’avons pas le temps pour des
explications compliquées et une rationalisation; mais nous savons qu’ils
fonctionnent. Une approche qui permet de gagner du temps est simplement
de les essayer et de voir ce que ça donne. Est-ce qu’ils fonctionnent
toujours?
Puis il existe un modèle de pensée qui fonctionne à un
méta-niveau : utilisez une astuce trop souvent, et elle cessera de
fonctionner. Soufflez dans le nez d’un cheval trop souvent, et il vous
mordra ou vous frappera. « Trop d’une bonne chose est une mauvaise chose »,
pourrait-on dire. C’est encore quelque chose que nous apprenons en
grandissant, et cela tempère notre enthousiasme, en tant qu’adultes, à
pousser les choses trop loin. De façon très intéressante, cela ne
fonctionne qu’au niveau de l’individu ou d’un petit groupe. En tant que
sociétés, nous poussons toujours les choses trop loin – jusqu’au point
où elles cessent de fonctionner.
Lorsque nous poussons les choses trop loin, nous restreignons nos choix
futurs. Soufflez dans le nez d’un cheval trop souvent, et non seulement
cela devient une mauvaise idée, mais il en est de même si vous le
harnachez trop souvent, si vous le montez trop souvent ou même si vous
le faites marcher trop souvent. Parce que le cheval ne vous aimera plus.
C’est encore une autre chose que nous apprenons comme enfant : une fois
que vous avez ruiné une bonne chose, elle reste en ruine. Mais, en tant
que sociétés, nous semblons ne pas avoir une telle sagesse enfantine.
Nous continuons à pousser les choses trop loin et chaque fois que nous
nous posons des questions stupides, telles que « Quelle est la solution à ce problème? »
quiconque propose que nous ne disposons d’aucun autre choix que d’en
subir les conséquences – ce qui est souvent la vérité – est susceptible
d’être moins populaire et il est pratiquement garanti qu’il sera ignoré
par ceux qui annoncent avoir des solutions.
Une autre façon de regarder cela, c’est en termes de conséquences.
Les actions ont des conséquences. D’abord toute action donnée peut
produire le résultat recherché : souffler dans le nez, cela fait bouger
la queue. Mais plus tard, si on pousse trop loin, cette même action
produira un résultat involontaire : souffler dans le nez, on prend un
coup de sabot. Non seulement ça, mais au-delà de ce point, presque
toutes les actions produiront des conséquences imprévues. Donnez-lui de
l’eau – vous obtenez une ruade. Nettoyez sa stalle, vous êtes frappé.
Essayez doucement, vous êtes frappé. La solution à cette classe de
problème, au niveau méta-méta, est avant tout d’admettre qu’il n’y a pas
de solutions. Mais quand une société atteint ce point, quiconque le
propose, encore une fois, sera probablement ignoré.
Courir le risque d’être impopulaire et ignoré, je crois que cela doit
être exploré plus avant. Nous avons beaucoup de modèles complexes pour
nous expliquer pourquoi les choses cessent de fonctionner. Mais nous
manquons de modèles simples, qui seraient évidents même pour un enfant.
Certains modèles assez complexes ont été proposés, dont l’un par Joseph Tainter.
Il a soutenu que la société se développe jusqu’à ce qu’elle atteigne un
sommet abstrait de complexité sociétale, auquel cas elle croise le
point des rendements décroissants. Il n’y a aucun mécanisme permettant
de diminuer la complexité d’une manière contrôlée. Au lieu de cela, elle
continue d’investir dans une complexité toujours plus grande, allant de
la diminution à des rendements négatifs. La complexité consomme de plus
en plus de ressources et, finalement, la société manque de ressources
et s’effondre. Par conséquent, nous devons nous préparer à L’effondrement des sociétés complexes. Mais je ne pense pas que ce modèle fonctionne plus que les autres. Laissez-moi vous expliquer pourquoi.
Les mesures de la complexité sont… un peu complexes, et la
comptabilité nécessaire pour calculer où est le point de rendement
décroissant pour investir dans une complexité supplémentaire est
également décourageante. Tout d’abord, que mesurons-nous? Dans une
économie qui fonctionne sur le travail humain physique ou intellectuel,
nous pouvons mesurer le nombre d’emplois différents existants. Mais dans
une économie où la contribution du travail physique est minime et où la
plupart des emplois ont été automatisés, cela n’a aucun sens, car
essentiellement tout le monde a un seul et même travail. Il s’agit de
s’asseoir devant un ordinateur et pousser des boutons.
Mais ce n’est pas un travail réel. La plupart de ces « travaux »
résiduels, comme la plupart d’entre nous le savent par expérience
personnelle, n’existent que pour que nous puissions être occupés. Le
travail réel est actuellement réalisé par des algorithmes informatiques
exécutés sur des postes de travail et des serveurs Internet, où le coût
de la complexité est faible et en baisse continue. Le travail
intellectuel de l’écriture du code informatique était un facteur
limitant, mais avec l’avènement des algorithmes adaptatifs et de
l’apprentissage par machine, cette barrière a également été franchie.
Une société de personnes sous-employées dont le travail unique
consiste à se prétendre occupé en poussant des boutons peut maintenant
être arbitrairement complexe. Bien sûr, notre intuition pourrait nous
dire que cela va s’effondrer à un certain point dans un proche avenir,
mais ne nous faisons pas d’illusion sur le fait que la « complexité sociétale »
nous offrira une quelconque idée clé du processus. Nous ne sommes pas
intéressés par l’effondrement en tant que concept abstrait, mais dans
ses manifestations physiques, et à ce stade, la complexité est en grande
partie détachée de quelque chose de physique car le nombre de Watts/
milliers de milliards de code de programme continue de baisser. Désolé,
Professeur Tainter, nous devrons passer à autre chose, ou l’effondrement
des sociétés complexes restera un mystère.
Une autre approche, un peu plus fructueuse, est d’examiner les
finances et l’économie. Voici un domaine entier qui est volontairement
privé de quelque chose de physique. Les économistes s’opposent
généralement à l’idée de limites physiques, telles que les ressources
naturelles non renouvelables, en particulier l’énergie. Leur hypothèse
de départ est que produire quelque chose n’est qu’une question d’argent
pour le payer, et l’argent peut être littéralement créé
pour exister au besoin. Notez que l’argent est une quantité sans
dimension: les dollars sont mesurés en dollars. Notez également que
c’est défini circulairement : combien vaut une valeur dépend de son
prix, et son prix dépend de la valeur que celle-ci détermine, telle
qu’elle est déterminée par le marché. Pour une chose donnée échangée, il
existe une courbe de demande et une courbe d’approvisionnement, et on
suppose qu’elles se croisent; mais que faire si ces courbes (qui
n’existent pas vraiment) ne se croisent pas du tout? Une chose appelée
l’« équilibre du marché » est censée exister réellement – pas seulement en théorie – mais que faire si ce n’est pas le cas?
Vous pouvez être persuadé que ce sont les mécanismes actuels, et les gens parlent encore des « lois de l’économie »
sans mourir de rire. Ou vous pouvez croire que ce sont des
rationalisations pratiques – des efforts motivés par la politique pour
expliquer comment les choses semblent avoir fonctionné (pour un court
moment) dans le but de légitimer le système capitaliste comme juste,
honnête et inévitable. Une autre approche – celle que je préfère – est
de voir l’économie comme un système de contrôle social qui fonctionne
alors que les ressources naturelles sont abondantes et que les effets de
la pollution, de la dégradation de l’environnement et de la destruction
de la société ne sont pas encore mortels. Ces conditions ne durent que
pour un moment, et après que la société a poussé les choses au-delà du
point de non-retour, les théories et les rationalisations utilisées pour
renforcer son système de contrôle social seront éjectées de l’histoire
comme un culte païen de plus qui aura disparu. Après ce point, la valeur
résiduelle de l’argent, mesurée dans d’autres produits, dépendra de ses
utilisations résiduelles, qu’il s’agisse d’allumettes ou de papier
hygiénique.
Il semble, en ce moment, que beaucoup des modèles de pensée
économique triviaux qui ont pu fonctionner ne le font plus. Un de
ceux-là dit que les faibles taux d’intérêt stimulent la croissance
économique. Mais, s’il y a quelques années, il s’avérait qu’il fallait
quatre unités de dette pour produire une unité de croissance du PIB,
maintenant ce nombre est plus proche de 10. Si la croissance ne
maintient pas la dette, cette dette ne sera jamais remboursée. Mais que
se passera-t-il si nous faisons en sorte que la dette puisse continuer à
s’accumuler, en gardant les taux d’intérêt à zéro ou, mieux encore, en
les rendant négatifs?
Il y avait une sorte de « loi de l’économie » (rions un
coup!), préconisée par Alan Greenspan, disant que les ratios dette / PIB
de plus de 100% conduisent à une hyperinflation et à une faillite
nationale. Est-ce qu’il y a eu une rupture majeure qui a invalidé cette « loi »?
Peut-être est-ce que c’est juste un peu lent de reconnaître les
faillites nationales d’entités énormes comme les États-Unis, le Japon et
la zone euro. Si c’est le cas, tout ce que nous devons faire, c’est
attendre…
Si les taux d’intérêt sont à zéro ou négatifs, il n’y a aucun moyen
d’investir en toute sécurité à un taux de rendement positif, et l’idée
de posséder de l’argent devient moins attrayante. Pourquoi économiser
pour la retraite si vos économies s’évaporent au fil du temps,
consommées par l’inflation, qui d’ailleurs n’est pas nulle? Ah, mais
vous pouvez investir vos économies en actions ou en immobilier ou en bulbes de tulipes!
Vous pourriez, mais la plupart des gens qui souhaitent se retirer
préfèrent investir dans des choses qui garantissent un certain taux de
rendement. Dans un environnement à croissance nulle, les investissements
spéculatifs deviennent un jeu à somme nulle : quelqu’un gagne (en
général, quelqu’un qui est déjà très riche et qui a accès à des
informations privilégiées et à un crédit bon marché) et le reste d’entre
nous perdent.
À ce stade, la seule façon d’empêcher l’économie de plonger est de
continuer à s’endetter à un rythme toujours plus frénétique tout en
créant des bulles financières toujours plus importantes. Personne ne
sait quand ce cheval va ruer et nous envoyer un coup de sabot dans la
tête, mais nous savons tous que ce moment arrivera. Et maintenant que
nous avons poussé cette situation trop loin, quelles sont nos options?
Eh bien, aucune, vraiment. Tout ce que nous pouvons faire, c’est
d’attendre l’effondrement déflationniste, car comme les monnaies
hyper-inflatées, les bulles financières vont éclater et la plupart de ce
qui est actuellement considéré comme de la « richesse » va se
transformer en une pile d’actifs sans valeur – des choses inutiles que
personne ne peut vendre ou se permettre de maintenir en état vendable.
C’est probablement le mieux que nous puissions faire dans un domaine
fictif comme les finances et l’économie. Mais peut-être que nous pouvons
faire mieux en regardant les systèmes physiques – ceux qui sont décrits
en utilisant des unités physiquement mesurables plutôt que des
quantités théoriques et circulaires telles que USD, EUR ou JPY. La
direction évidente où regarder, c’est l’énergie, car les carburants pour
le transport et l’électricité, sont les ingrédients vitaux dont
l’économie industrielle mondiale a besoin pour fonctionner.
Il existe un modèle de pensée simple qui dit ceci : plus vous forez
pour trouver du pétrole, plus vous allez produire de l’énergie. Ceci a
été vrai très longtemps : utilisez une unité d’énergie pour forer un
puits dans l’ouest du Texas et 100 unités d’énergie jailliront du sol.
Mais cela ne semble plus être vrai. Oui, les volumes de pétrole produits
sont encore impressionnants, mais combien de cette énergie est-elle
aspirée dans le sol, sous la forme de coûts d’exploration et de coûts de
production directs et indirects? Chaque année, une part de plus en plus
grande! Et il semble que quelque chose a déjà éclaté. Regardez ce tableau :
les kilomètres parcourus ont augmenté de façon régulière chaque année
jusqu’en 2007. Après cela, les volumes de pétrole sont restés presque
constants, voire ont augmenté légèrement, mais les kilomètres parcourus
par des véhicules ont diminué de près de 800 millions de km par an.
Il semble que nous ayons eu une formule, le forage pour le pétrole produit plus d’énergie,
et que nous l’ayons poussé trop loin, et que l’on s’approche du point
où forer pour trouver du pétrole produira moins d’énergie que ne pas
forer. Mais beaucoup de gens croient que nous avons encore d’autres
options. Qu’en est-t-il?
Une proposition consiste à passer aux voitures électriques. À
l’exception de quelques applications, principalement liées aux petites
voitures et aux chariots de golf, l’électricité est une source d’énergie
très faible pour le transport. La proportion d’énergie délivrée aux
roues est beaucoup plus petite que celle des carburants liquides. Il y a
des pertes dans la transformation de l’énergie mécanique ou solaire en
électricité; il y a des pertes de transmission; il y a des pertes dans
les batteries; enfin, il y a des pertes dans les moteurs électriques. Un
véhicule qui utilise une combustion interne peut être jusqu’à 30%
efficace (il existe des limites thermodynamiques difficiles à dépasser
et des inefficiences inévitables). Sur un véhicule électrique, si vous
multipliez toutes les pertes, on arrive à 10% à 12% d’efficacité. Compte
tenu de la même quantité d’énergie, le nombre des kilomètres parcouru
par un véhicule électrique peut être de moitié inférieure à celui
parcouru par un véhicule à combustion interne. Peut-être que nous
pouvons nous convertir aux voitures électriques, si nous conduisons sur
la moitié de nos parcours ou si la moitié d’entre nous abandonnent la
conduite.
Un autre fait souvent négligé est qu’une conversion massive aux
voitures électriques va détruire le marché de l’essence. Personne ne
suggère même de se débarrasser des camions diesel ou des engins de
construction, des générateurs ou des locomotives diesel d’urgence, ou
des navires qui fonctionnent sur du combustible pétrolifère, ou que des
avions à réaction brûlent autre chose que du carburéacteur, de sorte que
les distillats de pétrole seront encore très demandés. Mais ils seront
maintenant deux fois plus chers. Vous voyez, environ la moitié de ce qui
peut être utilement produit à partir d’un baril de pétrole brut finit
par être mélangé et commercialisé comme de l’essence. Si la moitié de
chaque baril de pétrole ne peut être vendu, les prix des carburants
liquides restants vont doubler, tout comme les tarifs de fret. Cela
entraînera une récession qui, entre autres choses, détruira la demande
de voitures électriques. Si les prix de l’essence chutent fortement et
si les tarifs de l’électricité montent en sens inverse, quelle personne
saine choisirait une voiture électrique? Il s’avère donc que la
conversion aux voitures électriques est un bon moyen de… ne pas
convertir le parc automobile en voitures électriques.
Mais que se passerait-il si nous proposions de nouveaux moyens
efficaces de produire de l’électricité à l’aide d’éoliennes et de
panneaux solaires? Seriez-vous surpris si cela se révélait être un bon
moyen de produire moins d’électricité et consommer plus d’énergie
fossile plutôt que moins? Je ne le serais pas. Les éoliennes et les
panneaux solaires sont issus d’un processus industriel intensif qui
comprend l’extraction, le transport et la fusion du minerai (qui utilise
du carburant diesel et du charbon) et la fabrication (qui utilise de
l’électricité, dont la plupart provient de la combustion du charbon ou
du gaz naturel). Ils doivent être transportés et installés (nécessitant
plus de diesel). Ils sont une source intermittente de puissance (le vent
et le soleil ne sont pas réguliers) et nécessitent des redondances à
base de combustibles fossiles. Ils ne peuvent pas être utilisés comme
énergie primaire car ils ne sont pas réguliers. Et ils ne peuvent pas
être utilisés comme énergie de pointe car ils sont intermittents. Dans
l’ensemble, il se peut très bien que le résultat soit moins
d’électricité que ce qui pourrait être produit en brûlant simplement les
combustibles fossiles.
Comme si cela ne suffisait pas, il y a encore d’autres informations à
garder à l’esprit. Comme le fait que, rien que pour suivre la
croissance mondiale de la demande d’électricité, il faudrait couvrir
d’éoliennes une superficie de la taille des îles britanniques chaque
année. Dans plus de 50 ans, cela signifiera avoir couvert la moitié de
la Russie avec des éoliennes. En outre, il y a le fait qu’un tel
investissement massif dans des éoliennes retirerait les ressources à
d’autres activités économiques, de sorte que même si les éoliennes
étaient érigées à profusion sauvagement, la demande d’électricité
pourrait s’évaporer, ainsi qu’une grande partie du reste de l’économie.
Soyez assuré, rien de tout cela ne se produira probablement. Les
sources renouvelables d’électricité, l’énergie éolienne et solaire,
représentent moins de 1% de la consommation mondiale d’énergie, et il
est peu probable qu’elles représentent plus encore, en termes absolus.
En termes relatifs, si les combustibles fossiles n’étaient plus
disponibles, l’électricité provenant du vent et de l’énergie solaire,
ainsi que l’hydroélectricité et le nucléaire résiduel, seront tout ce
qui reste, pendant un certain temps, car aucun de ces équipements ne
peut être maintenu ou remplacé sans combustibles fossiles.
Certaines personnes acceptent la situation autour de l’essence et du
transport électrique, ainsi que les graves limitations à l’utilisation
des sources d’énergie renouvelables, mais cela ne les arrête pas et
elles proposent une énorme plan de construction autour de l’énergie
nucléaire. Hélas, cela ne fonctionnera pas non plus. Tout d’abord, les
centrales nucléaires prennent beaucoup de temps et une énorme quantité
d’énergie primaire de combustible fossile pour être construites. Elles
absorbent de l’énergie pendant les deux décennies qu’il faut pour en
construire une. Puis elles remboursent cette énergie avec l’électricité
qu’elles produisent au cours des décennies suivantes. C’est-à-dire, à
moins qu’elles ne fondent comme Tchernobyl ou Fukushima, car dans ce
cas, elles finissent par utiliser beaucoup plus d’énergie qu’elles
n’auront jamais produite, de par les ressources nécessaires pour
atténuer les crises qui vont découler de ces catastrophes.
En outre, les centrales nucléaires ne sont pas très maniables et sont
plus sûres lorsqu’elles sont exploitées à un niveau de charge constant.
Mais la demande d’électricité fluctue avec des cycles quotidiens et
hebdomadaires, et d’autres sources d’énergie – comme les centrales
électriques au gaz naturel – doivent compenser ces fluctuations. Ainsi,
le rôle maximum joué par l’énergie nucléaire est limité.
Le dernier recours de ceux du camp des « Mais il doit y avoir des solutions! » est de proposer des technologies qui n’existent pas. « Pourquoi ne pas construire beaucoup de réacteurs à fusion nucléaire? »,
demandent-t-ils. Bien sûr, pourquoi pas. J’aimerais venir voir le
prototype de production de votre nouveau réacteur de fusion nucléaire.
Qu’en est-il de jeudi prochain? D’accord alors, dans environ deux ou
trois décennies à partir de maintenant? Toujours à bientôt? Et combien
de centaines de milliards de dollars ont-ils été gaspillés sur ce projet
pour animaux de compagnie? Peut-être que vous avez poussé trop fort et
qu’il est temps de s’arrêter. [Il y a aussi la recherche autour des centrales au thorium, NdT.]
Les gens, même les enfants, savent que c’est généralement une
mauvaise idée de pousser les choses trop loin. Ils se rendent compte que
si vous allez trop loin, vous devez vous arrêter, revenir en arrière et
essayer d’autre chose ailleurs. Mais les sociétés semblent beaucoup
plus stupides que les enfants, même les plus malvoyants et les plus
démunis : elles poussent aussi fort et aussi longtemps qu’elles le
peuvent, jusqu’à ce que quelque chose casse. Et puis elles exigent un
leader qui les réconforte et leur dise où pousser trop fort pour la
suite. Je ne pense pas que ce soit une bonne solution pour le monde.
Néanmoins, de nombreux escrocs petits et grands verront cela comme étant
à leur avantage personnel pour tromper et offrir de faux espoirs.
Espérons plutôt que ceux parmi nous qui sont intelligents reconnaîtront
qui sont ces escrocs et refuserons de les suivre.
Dmitry Orlov
Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateur de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie », c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.
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