Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
On m’a récemment demandé de donner une conférence intitulée « La crise énergétique et économique américaine qui approche ». En d’autres termes, comment les États-Unis pourraient-ils rencontrer des problèmes qui mènent à une crise ? Comme nous le verrons, de nombreux problèmes qui pourraient mener à une crise (tels que la disparité salariale accrue et la difficulté de percevoir suffisamment d’impôts) sont des problèmes que nous commençons déjà à rencontrer.
Dans cet exposé, je discute d’abord du lien entre l’énergie et l’économie. Sans ce lien, il n’est pas logique de parler d’une crise en matière d’énergie et d’économie. Je discute ensuite de sept questions qui pourraient mener à une crise énergétique et économique aux États-Unis.
La croissance économique est étroitement liée à la consommation d’énergie
Si nous regardons les données mondiales, il est clair qu’il existe un lien étroit entre la consommation d’énergie et la croissance économique.
Sur une base pays par pays, on peut croire que nous avons atteint une nouvelle situation où un pays n’a pas vraiment besoin d’un approvisionnement énergétique croissant pour sa croissance économique.
Par exemple, sur la diapositive 3, la ligne récente presque verticale pour les États-Unis suggère que l’économie américaine peut croître sans presque augmenter sa consommation annuelle d’énergie. Cette situation plutôt étrange découle du fait que le calcul standard oublie l’énergie incorporée dans les biens importés. Ainsi, si les États-Unis veulent externaliser une grande partie de leur fabrication en Chine, la consommation d’énergie utilisée pour fabriquer ces produits apparaîtra dans les données de la Chine, et non dans les données des États-Unis. Cela donne au pays qui a sous-traité son industrie manufacturière un très bon ratio, à la fois en ce qui concerne sa consommation d’énergie et ses émissions de CO2.
L’achat de pétrole brut importé d’autres pays (comme depuis l’Arabie saoudite) est également utile pour réduire la consommation d’énergie, car il faut de l’énergie de divers types pour extraire le pétrole. Si l’extraction de pétrole a lieu en Arabie saoudite, en utilisant des tubes en acier provenant de Chine, l’énergie utilisée dans l’extraction apparaîtra dans les données de ces deux pays. Ni la Chine ni l’Arabie saoudite n’obtiennent autant de croissance économique, par rapport à leurs dépenses énergétiques, que les États-Unis. Afin de donner un sens à ce qui se passe, nous devons regarder le total mondial.
Nous voyons que la croissance de la consommation mondiale d’énergie suit un schéma qui n’est pas très différent de celui de la Chine. Sa croissance n’est pas « une verticale ». Il faut de plus en plus d’énergie pour créer des biens et services supplémentaires. Nous devenons un peu plus efficaces dans ce processus au fil du temps, mais l’énergie est vraiment nécessaire dans de nombreux domaines de l’économie :
- Par les entreprises, pour créer des biens, tels que de la nourriture et des services, tels que des voyages pendant les vacances ;
- Par les gouvernements, pour créer des routes, des écoles et d’autres services publics ;
- Par des citoyens individuels, pour cuisiner, chauffer leurs maisons et pour leur transport.
Il existe de nombreux systèmes auto-organisés qui semblent se développer de leur propre chef en présence des sources d’énergie disponibles (c’est-à-dire dans des systèmes thermodynamiquement ouverts). Les plantes et les animaux sont des exemples de systèmes auto-organisés en croissance. Les ouragans, les écosystèmes et les étoiles sont aussi de tels systèmes. Les économies semblent également être de tels systèmes. Le nom donné à un tel système est un système dissipatif.
Je vois l’économie mondiale comme un jeu de construction pour enfants. Elle se compose de nombreux éléments différents, dont certains sont énumérés sur la diapositive 5. Une économie est auto-organisée dans la mesure où de nouvelles entreprises se créent lorsque certains entrepreneurs voient une opportunité. Les consommateurs décident quel produit acheter en fonction du produit qui répond le mieux à leurs besoins et en fonction du prix. Les gouvernements décident de modifier les lois et les niveaux d’imposition, en fonction du fonctionnement de l’économie à un moment donné.
Ce système se développe progressivement au fil du temps, à mesure que de nouveaux clients et des entreprises s’ajoutent. À mesure que de nouveaux produits et de nouvelles entreprises sont ajoutés, les produits et les entreprises qui ne sont plus nécessaires sont retirés. Par exemple, lorsque l’automobile individuelle a été inventée, il n’y avait plus besoin de nourrir et d’abriter un grand nombre de chevaux pour le transport. Ainsi, le système s’est auto-organisé pour éliminer les services nécessaires aux soins des nombreux chevaux utilisés pour le transport.
Note du traducteur
James Howard Kunstler explique lui que ce sont les transports en commun avec des tramways électriques qui avaient pris le relai des chevaux. La voiture individuelle n'a été « imposée » qu'après un intense lobbying des compagnies pétrolières pour imposer la voiture et démanteler une grande partie des transports en commun.
Même si nous voulions nous débarrasser des voitures et revenir aux chevaux, nous ne pourrions vraiment pas le faire maintenant. Dans un certain sens, la structure montrée sur la diapositive 5 est creuse, car des capacités antérieures qui ne sont plus nécessaires tendent à disparaître. La nature creuse de l’économie fait qu’il est presque impossible de revenir en arrière si nous perdons en quelque sorte nos capacités existantes – pas assez de pétrole, ou un problème d’électricité, ou un problème commercial international, ou un problème financier. Au lieu de cela, nous devrons construire de nouveaux systèmes qui fonctionneront dans le nouveau contexte : épuisement des ressources, niveau de population très élevé, niveau de pollution important et sols dégradés. Le système auto-organisé existant risque de s’effondrer et seule une partie pourra être maintenue.
Voici un aperçu des objectifs de cette présentation.
Sept façons par lesquelles une crise économique américaine peut survenir
- Les prix du pétrole augmentent trop pour les consommateurs ;
- Les prix du pétrole tombent trop bas pour les producteurs ;
- Les prix de gros de l’électricité chutent trop bas à cause des distorsions causées par les vents intermittents et l’énergie solaire ;
- La bulle de la dette croît sous l’impulsion de taux d’intérêt très bas, puis s’effondre ;
- Les promesses de pensions de retraite ne peuvent plus être payées ;
- Le gouvernement américain ne peut pas percevoir suffisamment de taxes ;
- Le piratage persistant sur Internet limite son utilisation.
1. L’augmentation des prix du pétrole sera trop haut pour les consommateurs
La diapositive 7 décrit le problème qui préoccupe la plupart des gens : les prix du pétrole augmenteront trop pour les consommateurs. En fait, nous avons clairement eu des problèmes avec les prix élevés dans un passé récent. Les prix élevés en 2007 et au début de 2008 semblent avoir brisé la bulle de la dette qui existait à ce moment-là, comme je l’explique dans un article universitaire intitulé « Limites d’approvisionnement en pétrole et crise financière persistante ».
Peu de temps avant que les prix du pétrole ne recommencent à remonter à la fin de 2008, les États-Unis ont mis en place une politique d’assouplissement quantitatif (QE) visant à réduire les taux d’intérêt et à encourager ainsi davantage de dettes. Une dette supplémentaire avec des taux d’intérêt bas peut « gonfler » l’économie de plusieurs façons :
- Une partie de cette dette à faible taux d’intérêt peut être utilisée par les gouvernements pour financer des prestations de chômage et des projets tels que la construction de routes ;
- Une partie de cette dette à faible taux d’intérêt peut être utilisée par les entreprises pour ouvrir de nouvelles usines et donc embaucher plus de travailleurs ;
- Une partie de cette dette à faible taux d’intérêt peut être utilisée par les citoyens pour acheter une maison, une voiture ou une éducation à l’université.
Les camemberts de la diapositive 8 peuvent sembler un peu exagérés, mais je voulais faire une remarque. Notre salaire peut être divisé en trois parties :
[1] Les biens essentiels dont les prix sont très influencés par le prix du pétrole, comme la nourriture et l’essence. Outre la nourriture et l’essence, le coût du réfection d’une route, en particulier par de l’asphalte, dépend beaucoup du prix du pétrole. Les coûts plus élevés pour les routes seront reflétés dans les impôts que nous sommes tenus de payer. Presque tout type de produit expédié est affecté par le prix du pétrole, car le pétrole est le carburant habituel dans le transport. Le pétrole est généralement utilisé dans l’extraction des minerais métalliques, de sorte que le prix des métaux utilisés dans la fabrication des voitures, des appareils ménagers et d’autres biens est affecté par le prix du pétrole. Ainsi, une augmentation du prix du pétrole entraîne indirectement une inflation du coût d’un large éventail de biens et de services essentiels.
Pour aggraver les choses, les fluctuations du prix du pétrole peuvent être très importantes. Entre 2000 et 2008, nous avons vu le prix moyen mensuel du pétrole passer de moins de 20 $ le baril à plus de 130 $ le baril. Ainsi, alors que la croissance dans le segment des aliments et de l’essence est quelque peu exagérée, l’impact des changements de prix est beaucoup plus important que ce à quoi l’on pourrait s’attendre, compte tenu uniquement des prix plus élevés de l’essence.
[2] Le remboursement de prêts, tels que les paiements hypothécaires et les paiements dans l’automobile. Les remboursements de prêts de ce genre ont tendance à représenter une grande partie des dépenses pour la plupart des gens. Si les gens ne possèdent pas leur propre maison, ils doivent payer des loyers. Ces paiements de loyer sont, d’une certaine manière, similaires aux paiements de prêts, car ils couvrent indirectement le coût de l’hypothèque de quelqu’un d’autre. Ces coûts ont tendance à être fixes, même si le prix du pétrole augmente.
[3] Tout le reste. Ce sont les éléments non essentiels que nous coupons lorsque les budgets sont trop serrés. Les exemples incluent des contributions charitables, les soirées au restaurant et les voyages pendant les vacances.
En regardant la diapositive 8, il devient clair que si un gouvernement veut « contrecarrer » les prix élevés du pétrole, il doit baisser les taux d’intérêt. Cela tendra à rendre les paiements de voiture, les paiements hypothécaires, les prêts étudiants, et même les loyers un peu plus abordables, au moins pour les personnes dont les prêts sont affectés par les nouveaux taux d’intérêt bas. Souvent, les propriétaires sont autorisés à refinancer, pour profiter des nouveaux taux d’intérêt plus bas.
Le plan de cette année est d’augmenter plutôt que de baisser les taux d’intérêt. Inutile de dire que cela aura l’effet inverse ; cela va tendre à réduire la taille du segment « tout le reste » de nos revenus. Cet effet a tendance à être récessif.
Monarch Air est une compagnie aérienne britannique qui a fait récemment faillite. Elle se vantait de tarifs très bas. L’un des problèmes qui a mené à sa faillite a été la chute de la livre par rapport au dollar américain, ce qui a fait grimper à la fois le prix du pétrole et le prix des nouveaux avions.
Aujourd’hui, le prix dont les producteurs pétroliers ont besoin, y compris pour obtenir des fonds suffisants pour (a) réinvestir et (b) payer les taxes élevées dont les gouvernements ont besoin pour poursuivre leurs programmes, est probablement de 100 dollars le baril ou plus. Un tel prix entraînerait probablement une récession, car les achats dans la catégorie « tout le reste » de la diapositive 8 seraient comprimés.
2. Les prix du pétrole tombent trop bas pour les producteurs
La plupart des gens ne pensent pas à la possibilité que les prix du pétrole tombent trop bas pour les producteurs, mais c’est un problème majeur aujourd’hui. Lorsque les prix sont trop bas, les compagnies pétrolières doivent emprunter de l’argent pour continuer à opérer. Elles sont susceptibles de réduire le développement de nouveaux sites d’extraction. Avec des prix bas, les recettes fiscales que les gouvernements des pays exportateurs de pétrole sont capables de collecter tendent à tomber trop bas, entraînant des réductions des programmes gouvernementaux et un besoin de plus de dette. L’Arabie saoudite est confrontée à cette difficulté.
Les problèmes qui découlent de la faiblesse des prix du pétrole peuvent être cachés pendant un certain temps, car les investisseurs verront probablement les bas prix comme une grande opportunité. Ils pensent que « Sûrement, les prix du pétrole vont augmenter à nouveau ». Alors les investisseurs sont désireux d’acheter plus d’actions, et les banques sont disposées à émettre plus de dettes. À un moment donné, la situation devient insoutenable et plus aucun prêt n’est offert.
Cela fait maintenant trois ans que les prix sont tombés à un niveau manifestement trop bas pour les producteurs de pétrole. Il ne peut pas se passer de trop nombreuses années avant que quelque chose ne « casse ». Le Venezuela est un exportateur de pétrole qui ne peut pas collecter suffisamment de recettes provenant des exportations de pétrole pour se procurer les biens nécessaires, tels que la nourriture. D’autres exportateurs de pétrole pourraient éventuellement rencontrer des problèmes similaires.
L’une des principales raisons de la chute des prix du pétrole est la disparité croissante des salaires et la perte de pouvoir d’achat qui en résulte pour les 90% de travailleurs les plus pauvres. Aux États-Unis, les 90% les plus pauvres obtenaient environ 62% du revenu total comme récemment en 1992. Dans une enquête de la Réserve fédérale de 2016, maintenant seulement 49,7% du revenu total est allé à ces 90%.
La raison pour laquelle la disparité salariale est importante est que les 1% les plus riches (ou même les 10% les plus riches) ne peuvent pas acheter une grande partie des biens créés à partir du pétrole. Les plus riches 1% ne peuvent pas manger beaucoup plus de nourriture que tout le monde. Ils ne peuvent conduire qu’une voiture à la fois. Afin d’avoir une demande adéquate de pétrole, les 90% les plus pauvres doivent avoir un pouvoir d’achat suffisant pour des biens tels que les maisons et les voitures. Si les jeunes vivent plus longtemps avec leurs parents et ne sont pas en mesure de se permettre d’acheter leur maison, cela réduit la demande de pétrole. Il en va de même pour le transfert de la fabrication vers des pays où les salaires sont si bas que peu de personnes peuvent s’offrir des voitures et d’autres produits manufacturés.
La diapositive 12 montre un graphique de la Réserve fédérale avec la part des familles propriétaires (par opposition à celles payant des loyers) de leur résidence principale. Il y a eu une baisse de l’accession à la propriété de 69% en 2004 à moins de 64% en 2016. C’est une période où la disparité salariale a augmenté.
3. Les prix de gros de l’électricité baissent en raison des distorsions dues à celles produites par le vent et l’énergie solaire
Le vent et l’énergie solaire sont des sources intermittentes d’électricité. Elles fonctionnent correctement dans les applications où l’intermittence ne pose aucun problème, comme charger un téléphone portable équipé d’une batterie ou alimenter une usine de dessalement qui n’a pas besoin de fonctionner 24 heures sur 24. La plupart des analyses des avantages du vent et du solaire indiquent que ces sources ne conviennent que pour ces situations limitées, car elles omettent toute estimation du coût d’atténuation de l’intermittence.
L’intermittence devient un problème majeur lorsque le vent et le solaire sont ajoutés au réseau électrique. Les prix de gros de l’électricité peuvent chuter à des niveaux très bas lorsque l’électricité éolienne et solaire est disponible. Parfois, les prix peuvent devenir négatifs. La production d’électricité conçue pour être utilisée la plupart du temps (comme le charbon, le nucléaire et même certains types de production au gaz naturel) ne peut survivre sans subvention pour compenser les prix artificiellement bas de ce système. Le besoin de subventions pour les fournisseurs d’électricité de secours est vraiment un coût indirect de l’ajout de types intermittents d’électricité au réseau, mais les prix actuels ne reflètent pas cela.
Un contournement différent de ce problème de l’intermittence est d’ajouter une grande quantité de batteries ou un autre type de stockage. En théorie, les batteries pourraient être utilisées pour stocker l’électricité produite en été pour une utilisation en hiver, lorsque les besoins en chauffage sont les plus importants.
Une autre approche de l’intermittence consiste à accumuler considérablement les infrastructures produisant des énergies renouvelables intermittentes, avec l’idée de n’utiliser que la partie de la production d’électricité qui est vraiment nécessaire à tout moment. Une autre approche consiste à ajouter une transmission longue distance supplémentaire (légèrement utilisée) pour tenter d’atténuer les fluctuations.
Chacune de ces approches a tendance à être coûteuse. Les articles universitaires évaluant les avantages du vent et de l’énergie solaire négligent presque toujours le coût de l’atténuation de l’intermittence. Ainsi, ils suggèrent que le vent et le solaire peuvent être des solutions, alors qu’en fait, leur coût élevé risque d’entraîner les mêmes effets économiques préjudiciables que les prix élevés du pétrole. (Voir la diapositive 8).
La ligne pointillée sur la diapositive 14 montre la tendance à la baisse des prix de gros de l’électricité en Allemagne, car de plus en plus de sources intermittentes d’électricité ont été ajoutées au réseau. Dans le même temps, les prix finaux de l’électricité résidentielle ont augmenté à des niveaux de plus en plus élevés. Les pays ayant le plus recours à l’énergie éolienne et solaire ont tendance à avoir les prix de détail les plus élevés, comme le montre la figure 1 ci-dessous.
4. La bulle de dette grossit sous la pression de taux très bas puis implose
Comme nous en avons discuté plus tôt, la solution de rechange « standard » pour les prix élevés du pétrole est la faiblesse des taux d’intérêt, en raison de la relation montrée dans la diapositive 8. À un certain moment, cependant, les taux d’intérêt sont aussi bas qu’ils peuvent l’être.
Les taux d’intérêt indiqués à la diapositive 16 sont ceux des bons du trésors à 10 ans. Ceux-ci sous-tendent généralement les taux hypothécaires. Ces taux ont diminué depuis 1981, aidant à soutenir les prix des maisons, des terrains, des terres agricoles et d’autres actifs achetés avec de la dette à long terme. Les faibles taux d’intérêt rendent les paiements mensuels plus abordables que les taux d’intérêt élevés, de sorte que plus de gens peuvent se permettre d’acheter de tels actifs. Avec une plus grande demande, les prix des actifs ont tendance à augmenter.
En outre, avec toutes les rumeurs voulant que les États-Unis continuent d’augmenter les taux d’intérêt, les détenteurs d’obligations réalisent que la hausse des taux d’intérêt fera baisser le prix de vente des obligations qu’ils détiennent dans leur portefeuille. Ainsi, les fonds de pension et les autres organisations qui choisissent d’acheter des obligations (qui baisseront sûrement à la revente lorsque les taux d’intérêt augmenteront) et des actions choisiront de sur-pondérer les actions lors de nouveaux achats pour leurs portefeuilles. Cela aura tendance à faire monter le prix des actions, quel que soit le potentiel de bénéfices des sociétés sous-jacentes.
Une chose que je n’ai pas mentionnée dans la présentation, mérite d’être soulignée ici. Les taux d’intérêt à court terme augmentent depuis la fin de 2014, même si les bons du Trésor à 10 ans se sont maintenus de manière assez stable (graphique 2 ci-dessous). Ces taux d’intérêt à court terme affectent les paiements sur d’autres types de transactions – prêts hypothécaires à taux variable et prêts automobiles, par exemple.
Ces taux d’intérêt à court terme ont grimpé, ce qui a indirectement rendu certains types de biens moins abordables. L’augmentation des taux d’intérêt à court terme va, d’elle-même, pousser l’économie dans la direction de la récession.
En fin de compte, on peut s’attendre à ce que la bulle des prix des actifs s’effondre, comme ce fut le cas en 2008. Cela se produira peut-être lorsque les bénéfices des entreprises tomberont trop bas ; peut-être que cela se produira quand une récession frappera l’économie. Les prix de nombreux types d’actifs, y compris les actions, le prix des maisons, et le prix des entreprises peuvent s’attendre à baisser. Il y aura probablement beaucoup de défauts de paiement dans tous les secteurs de l’économie publique et privée et dans le monde des affaires. Dans une telle situation, les banques peuvent aussi faire faillite.
5. Les promesses de retraites ne peuvent pas être payées
Les biens et services livrés chaque année nécessitent l’utilisation de ressources matérielles telles que le pétrole, le charbon, le gaz naturel, les métaux provenant des minerais et le bois. Par le passé, la quantité de ces ressources physiques a augmenté, année après année, comme l’illustre le scénario 1 ci dessus.
Dans un monde fini, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que la quantité de ressources physiques augmente indéfiniment. À un certain moment, quelque chose ira mal, et la quantité de ressources extraites chaque année commencera à diminuer, comme dans le scénario 2. Dans un sens, les gens dans le monde peuvent s’attendre à devenir plus pauvres, parce que la quantité de biens et services qui peut être produite avec ces ressources en baisse devient plus petite, au lieu de plus grande, et que la part de chaque personne dans la production mondiale devient plus petite.
Selon la théorie économique standard, les prix des ressources augmenteront à mesure que la quantité de ressources diminuera, mais ce point de vue ne tient pas compte de la façon dont une économie en réseau fonctionne réellement.
Un scénario plus probable est que lorsque la quantité de ressources diminuera, la disparité salariale augmentera. En conséquence, on peut s’attendre à ce que les revenus de nombreux travailleurs à bas salaires diminuent. Le problème est que les emplois bien rémunérés nécessitent l’utilisation de ressources. Si les ressources disponibles diminuent, certains emplois risquent d’être éliminés. Aujourd’hui, une telle suppression d’emplois peut découler d’une technologie supplémentaire, éliminant ce qui était précédemment des emplois mal payés. Les études sur les effondrements du passé soutiennent l’idée que la baisse des salaires de la classe ouvrière a joué un rôle majeur dans ces effondrements. (Voir Secular Cycles de Peter Turchin et Surgey Nefedov).
Avec une plus grande disparité salariale, une plus petite part de la population pourra se permettre d’acheter des maisons et des voitures. Le scénario 2 de la diapositive 17 se produira, non pas parce que nous avons « épuisé » les ressources, mais parce que trop peu de gens peuvent se permettre d’acheter des produits faits à partir de pétrole, de gaz, de charbon, de métaux et de bois. Les prix du marché seront inférieurs au coût d’extraction des ressources nécessaires, et ces entreprises feront faillite. Les gouvernements des exportateurs de pétrole peuvent s’effondrer, parce qu’ils ne peuvent pas collecter des recettes fiscales suffisantes au bas prix disponible sur les marchés mondiaux.
S’il y a moins de biens et de services disponibles, qui bénéficiera de ceux-ci ? Je vois la situation presque comme celle des chaises musicales. Est-ce que ce seront les retraités qui seront perdants, puisque les obligations détenues par les régimes de retraite commerciaux seront en défaut, et que les régimes gouvernementaux seront réduits ? Ou est-ce que ce seront les salaires des travailleurs moins qualifiés qui seront baissés, alors que de plus en plus de processus seront automatisés et que seuls des gestionnaires et des travailleurs hautement qualifiés seront nécessaires ? Si cela se produit, les prix des produits de base ne diminueront-ils pas davantage ? Nous devons vraiment avoir des niveaux de salaires adéquats pour un large éventail de travailleurs, si nous nous attendons à avoir assez d’acheteurs pour les biens produits.
Historiquement, lorsque les effondrements ont eu lieu, les gouvernements ont perdu au jeu des chaises musicales parce qu’ils ne pouvaient pas collecter suffisamment de recettes fiscales. Le problème était que les 90% de travailleurs les plus pauvres devenaient de plus en plus pauvres et donc moins en mesure de payer des impôts. Cela nous amène à notre prochain problème potentiel aux États-Unis.
6. Le gouvernement US ne peut pas collecter assez d’impôts
En janvier 2017, le Congressional Budget Office des États-Unis a fait une projection de la croissance de la dette fédérale détenue par les citoyens, en fonction de l’information disponible à ce moment-là. Leur prévision était que la dette atteindrait près de 150% du PIB. Ce serait un niveau beaucoup plus élevé que pendant la Seconde Guerre mondiale, la Première Guerre mondiale ou la guerre civile (diapositive 19).
Depuis janvier 2017, davantage d’informations sont disponibles. Nous avons connus maintenant trois ouragans, plus des incendies en Californie. Les citoyens touchés par ces événements ont besoin d’un soutien financier.
Nous connaissons également les projets de loi visant à réduire les impôts, en particulier pour les entreprises et les particuliers à revenu élevé. Ces propositions sont susceptibles d’accroître la disparité salariale après impôt et d’augmenter le montant du déficit. Si les compagnies choisissent de redonner cet avantage de la réduction d’impôt, ce sera probablement par le biais de dividendes à ceux qui sont déjà riches. En ce qui concerne les taux d’imposition des sociétés, nous essayons seulement de nous aligner avec les paradis fiscaux, alors il est difficile de croire que le changement fiscal entraînera beaucoup plus d’investissements américains.
7. Le piratage endémique va limiter l’utilisation d’Internet
Nous ne pensons pas qu’Internet soit important, mais il est devenu une partie essentielle de notre économie mondiale interconnectée. Internet facilite toutes les livraisons juste-à-temps nécessaires pour faire fonctionner l’économie actuelle. Toutes les solutions de contournement sophistiquées pour l’utilisation de l’électricité intermittente sur le réseau électrique supposent qu’Internet soit disponible pour transmettre des informations rapidement. Les banques utilisent Internet pour obtenir des informations leur permettant d’approuver des prêts et de compenser des chèques avec d’autres banques.
Aux États-Unis, nous avons l’habitude d’entendre des histoires incessantes sur le piratage sur Internet. L’histoire la plus récente implique un piratage majeur des données recueillies par Equifax dans le but de déterminer la solvabilité des individus aux États-Unis. Si ces données tombent entre de mauvaises mains, elles peuvent être utilisées pour des « vols d’identité ». Un imposteur peut demander un nouveau prêt au nom d’une autre personne ou peut voler un remboursement d’impôt sur le revenu destiné à quelqu’un d’autre.
Une autre situation de piratage dans la région d’Atlanta a récemment entraîné le vol d’un grand nombre de chèques destinés à être déposés directement sur les comptes bancaires des enseignants. Ils ont plutôt été déposés directement sur le compte d’un imposteur.
Si Internet n’est vraiment pas sécurisé, peu importe ce que nous faisons, cela seul pourrait causer des problèmes majeurs pour le système que nous avons maintenant en place. Nous n’avons pas non plus de « Plan B » disponible. Essayer de recommencer avec le « courrier distribué à la main », par exemple, serait un problème. Ceci est une autre illustration de la difficulté à revenir à une technologie antérieure.
Clairement, cette liste de problèmes potentiels n’est pas complète. Espérons qu’elle donne une idée du large éventail de problèmes auxquels nous sommes confrontés.
Gail Tverberg
Gail est une actuaire intéressée par des questions d’un monde fini : épuisement du pétrole, appauvrissement en gaz naturel, pénurie d’eau et changement climatique. Les limites du pétrole semblent très différentes de ce à quoi la plupart s’attendent, avec des prix élevés conduisant à la récession, et des prix bas conduisant à une offre insuffisante.
Liens
Je vous propose la lecture du dernier article de François Roddier sur un sujet connexe à la thermodynamique abordé ici par Gail.
Interconnectivité et robustesse au cours d’un cycle économique
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