dimanche 27 janvier 2019

Pourquoi la Fed, ni aucune autre banque centrale, ne peut vraiment normaliser

Article original de Chris Hamilton, publié le 30 décembre 2018 sur le site Econimica
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr

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La semaine dernière, j’ai souligné que depuis 2000, alors que la Réserve fédérale a cessé d’accroitre son bilan ou a commencé à « normaliser » (par le biais de la liquidation des actifs), les marchés boursiers ont eu des vapeurs.




Une idée simple aujourd’hui… celle que la fin de la croissance démographique (là où c’est important) est déjà là depuis longtemps (détaillé ci-dessous). En l’absence d’une croissance démographique parmi les pays qui consomment la quasi-totalité des ressources, un système économique et financier fondé sur l’endettement (pour contraindre des niveaux toujours plus élevés de consommation alimentée par l’endettement) ne peut finalement pas réussir. En d’autres termes, sans croissance démographique, les actifs ne s’apprécient généralement pas, les maisons ne sont plus qu’un abri plutôt que d’être des « investissements », et la dette n’est généralement qu’un frein aux dépenses futures. De même, sans croissance démographique, la consommation mondiale totale d’énergie est au bord du déclin séculaire.

Dans cette réalité, le seul moyen de maintenir ou de relever davantage les prix des actifs est une monétisation de plus en plus poussée de la banque centrale (c’est-à-dire de la contrefaçon planifiée et exécutée au niveau central). Bien sûr, ce système de monétisation est voué à l’échec, mais tant qu’il continue, les gains sont privatisés et les pertes sont socialisées. Mais en fin de compte, les marchés (et les économies, en tant que moyen d’échange honnête), seront compensés. Sans plus attendre, je détaille donc la fin de la croissance démographique (en particulier là où c’est important) :

1– En termes simples, la croissance démographique mondiale (naissances) a cessé d’augmenter il y a près de 30 ans ! Si l’on considère uniquement la première ligne (ligne noire en pointillés, graphique ci-dessous), il convient de noter que de 1950 à 1989, le nombre annuel de naissances dans le monde a augmenté de 73 % (+57 millions). Inversement, de 1989 à 2018, les naissances mondiales annuelles n’ont augmenté que de 1% (+1 million). Je me base sur les données de l’ONU et les estimations futures médianes (trop optimistes) de l’ONU.
Cependant, la répartition de ces naissances entre les différents groupes de nations (selon le revenu) a changé de façon spectaculaire entre 1950 et aujourd’hui… et changera encore d’ici 2050. Le graphique ci-dessous montre aussi le nombre total de naissances, mais aussi la proportion de naissances parmi les pays à revenu élevé, les pays à revenu moyen supérieur et en Chine. Elles ont presque diminué de moitié depuis 1950… tandis que la proportion de naissances parmi les pays à revenu faible et moyen inférieur a monté en flèche. En termes plus simples, les naissances chez ceux qui consomment beaucoup (environ 90 % de l’énergie totale mondiale) se sont depuis longtemps effondrées tandis que les naissances chez ceux qui consomment relativement peu (un peu plus de 10 %) ont grimpé en flèche.

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Mais maintenant, examinons les sources et le moment de ces naissances fluctuantes, ainsi que leurs répercussions sur la consommation.

Voici ci-dessous les naissances dans les nations à revenu élevé (ligne bleue) et les variations d’une année sur l’autre (colonnes rouges). Les revenus varient de 90 000 $ à 12 000 $ par habitant, et ces pays (États-Unis/Canada, UE, Japon/Corée du Sud, Aus/NZ, etc.) consomment 47 % de l’énergie mondiale totale. Les naissances ont chuté de 19% depuis le sommet de 1961, mais on s’attend à ce qu’elles stagnent indéfiniment (peu ou pas de croissance) grâce à l’immigration prévue qui compensera les taux de natalité négatifs.

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Voici ci-dessous les naissances annuelles des nations à revenu moyen supérieur (ligne bleue) et les variations d’une année sur l’autre (colonne rouge). Les revenus varient de 12 000 $ à 4 000 $ par habitant, et ces pays, dont la Russie, le Brésil, le Mexique, etc. consomment 18 % de l’énergie mondiale totale. Le nombre cumulatif de naissances dans ces pays a chuté de 12 % depuis le sommet de 1987 et on s’attend seulement à ce qu’il continue de diminuer.

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En Chine, voici les naissances annuelles avant (ligne bleue) et depuis la révision fin 2015 de la politique des 2 enfants (ligne pointillée verte), plus variation sur 12 mois (colonnes rouges, graphique ci-dessous). La Chine a augmenté sa part dans  la consommation d’énergie mondiale à 24% alors que les naissances ont chuté de 46% depuis le pic de 1989 ! Bien sûr, l’effondrement des naissances chinoises il y a près de 25 ans signifie qu’un effondrement similaire de la demande est en train de s’installer alors que cette population « nouvellement normale », nettement plus petite, entre dans l’âge adulte. Sur le plan économique, faites attention à la baisse de la demande intérieure.

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Voici ci-dessous les naissances annuelles des nations à revenu moyen inférieur (ligne bleue) et les variations d’une année sur l’autre (colonnes rouges). Ces pays ont des revenus de 4 000 à 1 000 dollars par habitant, y compris l’Inde, le Pakistan, le Nigeria, le Vietnam, etc. et représentent environ 3,1 milliards de personnes. Bien que les naissances continuent d’augmenter, la croissance annuelle des naissances a ralenti de plus de 90 % et devrait se stabiliser indéfiniment à partir de maintenant parmi ces pays qui consomment environ 11 % de l’énergie mondiale.

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Voici enfin ci-dessous les naissances annuelles des pays à faible revenu (ligne bleue) et l’évolution d’une année sur l’autre (colonnes rouges). Ces pays, qui représentent environ 700 millions de personnes, y compris la majeure partie de l’Afrique subsaharienne, ont des revenus inférieurs à 1 000 dollars par habitant et consomment moins de 1 % de l’énergie mondiale. Bien que le nombre de naissances continue d’augmenter, la croissance d’une année à l’autre est stable depuis 2000 et on ne prévoit un ralentissement de la croissance qu’à partir de maintenant.

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2 – La Chine est le centre épique du déclin démographique. Le graphique ci-dessous montre la population féminine chinoise de 15 à 44 ans en âge de procréer par rapport aux naissances chinoises. Non seulement les naissances ont chuté de 46 %, mais ce déclin s’est manifesté chez les femmes en âge de procréer. La population féminine chinoise de 15 à 44 ans n’est pas seulement inférieure d’environ 25 millions à celle de la même population masculine en Chine, elle est également en baisse de 14 % (-47 millions) par rapport au pic de 2007. D’ici 2035, le même groupe sera 30 % plus petit (-101 millions). Une population en chute libre avec des taux de natalité négatifs a le potentiel de provoquer des taux de natalité significativement plus faibles que ce qui est indiqué ci-dessous.

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Si l’on élargit l’analyse pour comparer la population en âge de procréer et les naissances des pays à revenu élevé et à revenu moyen supérieur (y compris la Chine), on constate dans le graphique ci-dessous que les naissances (colonnes bleues) ont atteint un sommet il y a presque cinquante ans et ne font que diminuer continuellement. Logiquement, il s’ensuit qu’à terme, la population en âge de procréer (ligne rouge) doit aussi atteindre un sommet, comme elle l’a fait vers 2010, et commencer son déclin indéfini. Les répercussions économiques, financières et même environnementales d’un déclin auto-renforcé de la population en âge de procréer, dont le taux de natalité est négatif, devraient être assez évidentes.

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3 – Voici ici les naissances mondiales par rapport à la population mondiale âgée de 75 ans et plus. En 1950, il y avait deux naissances pour chaque personne de 75 ans et plus. En 2018, l’inverse est presque vrai … puisqu’il y a près de deux personnes de 75 ans et plus pour chaque naissance. Étant donné que la population mondiale des 15 à 44 ans demeurera essentiellement inchangée à l’avenir, les naissances continueront d’être stables à la baisse tandis que toute la croissance de la population se situera parmi la population des 45 ans et plus… plus particulièrement, parmi les 75 ans et plus. D’ici 2050, il y aura plus de cinq personnes de 75 ans et plus par naissance… et d’ici 2100, onze personnes de 75 ans et plus par naissance.

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Conclusion


De toute évidence, le temps de la croissance démographique et de la croissance de la base mondiale de consommateurs est révolu. Un système basé sur la croissance des personnes âgées, siphonnant les bénéfices de la société, aux dépens des jeunes, c’est de la folie. En moyenne, moins de 10 % des 75 ans et plus travaillent et quand même ils gagnent/dépensent environ la moitié de ce qu’ils dépensaient pendant les années où ils gagnaient le plus.

Pourtant, on ne cesse de parler de croissance des actifs économiques et financiers et d’une volonté apparemment sans fin d’offrir le soutien monétaire et financier nécessaire pour cet objectif. Il est peut-être temps de reconsidérer notre idée que les banquiers centraux peuvent conjurer une croissance économique et financière infinie. Il est temps de reconsidérer où cela nous mène, à qui cela sert-il et à quel prix ? Il est temps d’envisager sérieusement des alternatives !

Chris Hamilton

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