Article original de James Howard Kunstler, publié le 26 Novembre 2018 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Ce qui peut mal tourner tournera mal. C’est tellement fondamental pour le fonctionnement de l’univers que Sir Isaac Newton aurait dû l’insérer entre ses 2e et 3e Lois du mouvement – mais il avait perdu une fortune dans la bulle financière des mers du Sud britannique vers 1721, après avoir murmuré à un collègue qu’il « pouvait calculer les mouvements des corps célestes, mais pas la folie des gens ». Note à tous les cow-boys des « hedges fund » : le vieil Isaac était probablement plus intelligent que vous (et tous ces algorithmes que vous chevauchez).
Était-ce un Thanksgiving pleurnichard cette année, une grinçante querelle de famille à propos de récriminations politiques, mâchées avec des fournées de sucreries confites ? Eh bien, oui, après le fiasco extraordinaire des audiences de Kavanaugh et des élections de mi-mandat contestées, le chemin qui nous mène vers Noël semble aussi un peu cahoteux, alors voici une courte liste détaillée de choses qui ont tendance à mal tourner :
L’Ukraine est au bord de la loi martiale après un incident naval avec des navires russes dans les eaux au large de la Crimée. Et alors ? La loi martiale ? Ils pourraient aussi bien décréter le chaos organisé. Les détails de l’incident autour du détroit de Kertch, entre la mer Noire et la mer d’Azov, restent obscurs, sans compter que deux navires de guerre ukrainiens et un remorqueur ont désobéi aux ordres des navires russes leur demandant de se retirer de leurs eaux maritimes, et que des tirs ont été échangés. Qui aurait cru que l’Ukraine avait même une marine de guerre, et comment pourrait-elle payer pour cela ? Mais maintenant, l’OTAN essaie d’entrer dans le jeu, ce qui signifie que les États-Unis seront entraînés dans le genre de conflit inutile et stupide qui déclenche les guerres mondiales.
Note au Golem d’or de la Grandeur (alias M. Trump) : cette bagarre ne nous regarde pas. La Russie, quant à elle, a demandé au Conseil de sécurité de l’ONU de se réunir à ce sujet, ce qui est la bonne réponse. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
Mise à jour lundi en fin de journée : J’ai entendu dire cet après-midi que la Russie disposait d’informations selon lesquelles des navires ukrainiens transportaient un engin explosif fourni par l’OTAN qui devait être utilisé pour faire sauter le pont stratégique sur le détroit de Kertch. Bavardage non confirmé. À développer …
Mise à jour mardi matin : Il vaut la peine de lire cet article du Saker sur la situation. Il écrit : « Considérant le taux de popularité actuel à un chiffre de Porochenko et le fait qu’il n’a aucune chance d’être réélu (du moins pas dans des élections un minimum crédibles), il est assez évident de comprendre pourquoi le régime Ukronazi à Kiev a décidé de provoquer une crise et d’en rendre la Russie responsable ».
Dimanche, environ cinq cents migrants d’Amérique centrale se sont précipités à la frontière des États-Unis et du Mexique à Tijuana. Les gaz lacrymogènes l’US Border Patrol les ont fait reculer. Mauvaise nouvelle pour ceux qui tentent de plaider en faveur de l’ouverture des frontières. Naturellement, le New York Times a dépeint cette situation comme une agression contre des familles, en ressortant de la naphtaline des histoires pleurnichardes en réserve, bien que la foule soit composée en grande majorité de jeunes hommes. Pour compliquer les choses, le nouveau président mexicain, Andrés Manuel López Obrador, populiste de gauche et ennemi de « Trumpissimo », prend le pouvoir samedi prochain. Tijuana étouffe maintenant avec les milliers d’errants qui ont été incités à marcher vers le nord pour tester les politiques d’immigration mal fagotées de l’Amérique. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
Les démocrates du Congrès seraient en train de fourbir « leurs armes » d’assignations à comparaître pour tisonner les supporters de Trump sur les charbons ardents, dans un cirque d’audiences de commissions, lorsqu’ils prendront effectivement le contrôle de la majorité de la chambre des représentants en janvier. Ils seront rejoints par des sénateurs qui riposteront lors d’audiences contrôlées par des républicains au Sénat, ce qui créera le pire match politique de foutage de gueule depuis la guerre de Sécession. Dans un univers correct, suffisamment de saleté sortirait de part et d’autre pour neutraliser les forces les plus sinistres de l’État profond – en particulier la séditieuse « communauté du renseignement ». Mais la vie n’est pas correcte, comme Jimmy Carter l’a fait remarquer autrefois, et l’exercice ne fera qu’attiser les flammes d’une antipathie déjà extrême. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
La locomotive qui tire ce tortillard de griefs est l’enquête de Robert Mueller sur la collusion russe. Je m’attends à ce qu’il produise d’immenses barges d’accusations contre M. Trump, sa famille et ses associés, et tous ceux qui ont reçu jusqu’à une tasse en souvenir de sa campagne de 2016. Mais je doute que cela ait une incidence sur l’« ingérence » des Russes dans les élections. Et dans ce cas, les accusations seront couvertes par les contre-accusations d’une enquête illégitime, ce qui signifie que nous sommes les bienvenus dans cette crise constitutionnelle dont nous entendons parler depuis deux ans. C’est une façon apaisante de décrire les choses, depuis une destitution désordonnée jusqu’aux troupes dans les rues américaines. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
Enfin, il y a l’éléphant dans la pièce, avec un gorille de 400 kg caracolant sur son dos : l’économie et son moteur diabolique, les marchés financiers. Quelqu’un a-t-il remarqué, avant Thanksgiving et le Vendredi noir, que les marchés sont orientés vers les récifs – et non vers les plages dorées du Mexique pour des vacances ? Les actions remontent en flèche au moment où j’écris ces lignes. Les banques Too Big Too Fail et leur chef de file, la Réserve fédérale, ont eu quelques jours pour organiser un « rally », et plus il monte en flèche, plus un grand nombre d’« idiots » restera pris au piège des marchés pour le massacre final, lorsque la marée redescendra. Les taux obligataires se regonflent aussi, ce qui signifie que le prix des obligations est en baisse. Mauvaise combinaison. La cerise empoisonnée sur le gâteau est le Bitcoin, qui a plongé d’environ 40 % en dix petites journées, ne valant plus qu’une poignée de dollars, 3000, et se dirige vers zéro. Trop dommage, comme dirait le Golem d’Or. Il y a moins d’un an, la situation semblait si solide. Qu’est-ce qui a pu mal tourner ?
James Howard Kunstler
Pour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.
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