jeudi 23 février 2017

Faits l’un pour l’autre

Article original de James Howard Kunstler, publié le 13 Février 2017 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr

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Ne vous laissez pas berner par les efforts inutiles de l’équipe Rouge et de l’équipe Bleue. Ils jouent juste au jeu de « Attrapez le drapeau » sur le pont du Titanic. Le navire est l’économie techno-industrielle. Il est en train de couler parce qu’il a embarqué trop d’eau (la dette), et la pompe de cale (l’industrie pétrolière) est en train de lâcher.

Aucune faction ne comprend ce qui se passe, bien que chacun ait un récit délirant mais élaboré dans le but de vous captiver en l’absence de tout plan crédible pour adapter la vie de notre nation aux réalités qui se font jour. Les Bleus et les Rouges sont les miroirs des illusions des uns et des autres, et la rage suit quand les illusions meurent, alors faites bien attention. Les deux factions sont prêtes à faire sauter le pays avant de se mettre d’accord sur ce qui se passe.


Ce qui est à venir est le fruit de la mauvaise gestion de notre société, car il est devenu clair dans les années 1970 que nous ne pourrions pas continuer à vivre indéfiniment comme nous le faisons – c’est-à-dire dans une entreprise de démolition 24/7. C’est incroyable ce que vous pouvez accomplir avec de la fraude comptable, mais en fin de compte c’est un affront à la réalité, et la réalité a une façon bien à elle de traiter les punks comme nous. La réalité a un tour de magie : elle peut faire s’évaporer le mirage de la fausse prospérité.

C’est exactement ce qui va se passer et cela se produira parce que le système financier est le moins fondé, le plus abstrait, des nombreux systèmes dont nous dépendons. Il est fondé sur la foi pure que les parties peuvent se faire confiance les unes aux autres pour remplir leurs obligations. Lorsque cette vanité s’effondre et que les banques ne peuvent pas faire confiance aux autres banques, les relations de crédit s’évaporent, l’argent disparaît, et les choses cessent de fonctionner. Vous ne pouvez plus obtenir de cash au distributeur. Le camionneur avec sa cargaison d’avocats ne fera plus sa livraison au supermarché parce qu’il sait qu’il ne sera pas payé. Le cultivateur devra regarder pourrir sur pied le reste de sa récolte. Les étagères des supermarchés vont se vider. Et vous n’aurez pas de guacamole.

Il y a trop de failles dans le puissant édifice de notre fraude comptable pour que le système bancaire mondial continue de boiter, continue de faire semblant de faire face à ses obligations. Ces lignes de faille traversent les marchés obligataires, les marchés boursiers, les banques elles-mêmes à tous les niveaux, les bureaux gouvernementaux qui prétendent réglementer les dépenses, les bureaux qui affectent de déclarer les données économiques, les bureaux qui négligent de réglementer l’inconduite criminelle, les capitaines d’industries, les compagnies d’assurance, les caisses de retraite, les garants des prêts hypothécaires, les prêts automobiles et les prêts étudiants et les agences de notation. La fraude comptable omniprésente répand une éthique criminelle dans les métiers anciennement légitimes comme la médecine et l’enseignement supérieur, qui deviennent de simples rackets, faisant de l’extraction de profits au maximum tout en mégotant sur la livraison des marchandises.

Tout cela va accabler Trump bientôt, et il va se débattre en essayant de faire face à un désordre gigantesque. Cela va certainement faire dérailler son désir de « Make America great again » : comme en 1962, avec des usines bourdonnantes, des routes à construire, des aventures dans l’espace, et un sentiment réconfortant de supériorité sur tous les vieux et tristes empires défaits à l’étranger. Je maintiens que cela pourrait devenir si mauvais si vite que Trump sera déposé par un quarteron de généraux et d’officiers de renseignement qui n’en peuvent plus de regarder quelqu’un agissant comme le capitaine Queeg dans la timonerie.

Ce pourrait être salutaire, puisque seul un choc extrême est susceptible de balayer les factions Bleu et Rouge de leurs tranchées de narration stupide. Si le Parti démocrate avait mis un cinquantième de l’effort qu’il gaspille sur les toilettes transgenre dans la politique pour atténuer nos tragiques mauvais investissements dans l’étalement sans fin des banlieues, nous aurions peut-être eu un début d’avenir plausible. Au lieu de cela, le Parti démocrate s’est transformé en une école maternelle d’enfants gâtés, qui se battent entre eux pour pouvoir jouer avec les legos. Le Parti républicain, c’est la maison de Norma Desmond dans Sunset Boulevard, mettant en vedette Donald Trump comme Max le majordome, travaillant dur pour garder vivante les illusions d’antan.

Tout ce non-sens est une distraction de la tâche à accomplir : imaginer comment vivre dans le monde post techno-industriel. Ce monde ne fonctionnera pas de la façon dont nous sommes habitués. Il écrasera nos hypothèses et nos attentes. Mentir sur tout ne sera pas une option. Nous n’aurons pas les ressources supplémentaires pour couvrir notre malhonnêteté. Il vaut mieux que notre argent soit sain mais si on s’en moque alors vous mourrez de faim ou vous gèlerez à mort. Vous feriez mieux d’espérer que l’autorité de la loi persiste et vous devriez travailler à la maintenir vivante où vous habitez. Et personne n’obtiendra des points bonus spéciaux à la gloire de la confusion sexuelle.

Je penche pour l’hypothèse des feux d’artifice financiers qui commenceraient autour de mars et avril, comme le débat irrespirable sur le plafond de la dette nous mène dans une impasse amère, où il deviendra évident qu’il n’y aura aucun bonus à dépenser pour la grande orgie d’infrastructure sur laquelle compte Trump le magnifique. Les élections en France et aux Pays-Bas ont le potentiel d’ébranler l’Union européenne, et avec cela la solidité des banques européennes. Bientôt, tout le monde dans tous les partis et factions se demandera : « Où sont passées les brillantes promesses de la modernité ? » alors que nous glisserons vers les premières étapes d’un monde fait à la main.

James Howard Kunstler

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