Article original de James Howard Kunstler, publié le 29 Février 2016 sur le site Kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
La riposte débile d’Hillary au slogan stupide de Trump, «Redonner sa grandeur à l’Amérique !», a été «… l’Amérique n’a jamais cessé d’être grande».
Je suppose qu’elle a voyagé autour des friches de centres commerciaux
en Caroline sans remarquer le carnage qui s’étale sur cette terre comme
une mortelle tuberculose. L’Amérique est en train de se suicider en
faisant de mauvais choix, depuis des décennies.
Nous avons récupéré les gains collatéraux de la Seconde Guerre
mondiale et nous les avons déversés dans un étalement péri-urbain
tellement déprimant que nos citoyens sont les personnes les plus
sur-médicamentées au monde. Cela seul pourrait aider à expliquer comment
Hillary et Trump avancent pesamment vers leurs nominations respectives.
Les gens qui les applaudissent, canalisés sur les parkings de Piggly Wiggly,
sont tellement assommés d’anxiolytiques qu’ils ne peuvent pas
comprendre, derrière leur désespoir masqué par cette pharmacopée, à quel
point ces deux célébrités odieuses incarnent les mêmes forces.
Une nation sombrant dans une telle fausseté est sûre de souffrir d’un
retour de bâton mettant sa vie en danger et il semble que la première
chose à faire sera d’en finir avec les partis politiques. Les démocrates
et les républicains sont allés au bout de leur processus de parti Whig [ridiculisés, NdT],
chevauchant lors de l’élection 2016 sur la barge des ordures de
l’histoire. Hillary jubilait après la primaire de Caroline du Sud de la
semaine dernière, où elle a bourré son sac d’entremetteuse avec des
votes noirs récoltés sur des fausses promesses de redémarrage des
combats pour les droits civiques. Il était pénible de voir ce sourire sortez-moi-de-là tendu sur son visage alors qu’elle faisait son dernier selfie en pensant anxieusement à l’épreuve du Super-mardi.
Je ne me soucie pas du nombre de victoires que Trump va engranger
dans ces primaires, les leaders du parti républicain ne le soutiendront
pas lors de la convention. Ils vont casser le parti en factions
belligérantes avant de lui laisser brandir la bannière de Lincoln et du Gipper.
Attention : les plans sont déjà en place pour pousser Trump dans le
fossé, pour le faire dérailler avec quelques scandales facilement
excavés d’une vie consacrée à graisser des pattes et à jouer à la balle
avec l’industrie de la construction à New York, dans le New-Jersey ou le
Nevada. A défaut, ils le laisseront avec la coque éventrée de
l’appareil du parti et avec un bon crochet, ils sortiront un autre gars
du chapeau pour le représenter à l’élection, bien financé sous une
bannière légèrement modifiée : Paul Ryan, Bloomberg, Romney, peut-être
même Kasich. Les frères Koch vont organiser la question financière. A
défaut, il y a toujours la magie mystérieuse de l’État profond pour gagner des amis et influencer l’histoire.
Cela ne veut pas dire que je me mets du côté de l’ancien
establishment républicain, je dis seulement qu’ils sont de plus en plus
désespérés, au point de vouloir faire dérailler ce monstre qu’ils ont
eux-même créé, et iront jusqu’à un suicide institutionnel pour le faire.
Il faudra plus qu’un autre cycle d’élection pour que, par miracle,
le centre droit du spectre politique américain puisse se réincarner en
quelque chose qui ressemble à un parti.
Ou peut-être est-ce cela le véritable moment de vérité de
l’Amérique impériale, quand tous les partis politiques se soumettent
au ressac des événements annonçant un tsunami. Aucun des abrutis de
commentateurs des médias, du Washington Post au New-York Times
ne semble remarquer que l’économie mondiale est en train de sombrer
dans le coma, et ce faisant, laisse derrière elle des bombes à
fragmentation sous forme de défauts dans le système financier.
Cette destruction, insidieuse jusqu’à présent, devrait apparaître au
grand jour exactement au moment des conventions de nomination. La marée
sera largement visible lorsque Hillary montera sur le podium, comme une
mauvaise blague, en maman nationale et que Trump sera assis
dans sa chambre d’hôtel de Cleveland, se demandant comment ses rêves
rococo de gloire se sont transformés en un sandwich merdique du
room-service.
La mousse de ce vortex en formation est sur nous. La plus
grande surprise de toutes est encore à venir et la télévision ne
parviendra pas à l’expliquer. Cette réapparition de dernière minute ne
sera pas celle de la célébrité connue sous le nom de Jésus-Christ, mais
plutôt celle d’un événement appelé la Guerre de Sécession.
James Howard Kunstler
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