Article original de James Howard Kunstler, publié le 24 Juillet 2017 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Nous en sommes maintenant au
point où les gens ordinaires ne peuvent même plus supporter les coûts
pour se garder eux-même en otage de ces conditions dégradantes.
Nous
ressemblons de plus en plus à la France à la veille de sa révolution en
1789. Nos classes sont distribuées différemment, mais l’inégalité est
tout aussi nette. L’aristocratie de l’Amérique, cette fois fondée
strictement sur les comptes bancaires, agit de plus en plus de manière
héréditaire comme sa progéniture insipide et ses relations avec des « stars »
(en politique, dans le showbiz, dans les affaires et dans les arts)
affirment leurs prérogatives sur la renommée, le pouvoir et la richesse.
Les électeurs n’ont-ils pas dénoncé l’importation sinistre du message « c’est mon tour » de Hillary ?
Ce qui est particulièrement frappant dans la similitude avec la cour des
Bourbons, c’est l’ignorance totale par les élites au pouvoir de
l’agonie des masses travailleuses situées en dessous d’elles,
principalement celles vivant loin des villes côtières. À peu près tout
ce qui avait du sens leur a été enlevé, bien que beaucoup de traces
matérielles de l’existence perdurent : un toit, des choses qui
ressemblent à de la nourriture, des voitures et des écrans de
différentes tailles.
Mais les endroits qu’ils sont censés appeler la maison sont soit
détruits – les petites villes et les villages originaux d’Amérique –
soit remplacés par de nouveaux « développements » si dépourvus
d’art, d’histoire, de pensée, de soin et de charme qu’ils n’amènent rien
aux communautés, et sont tellement indignes d’affection, que l’idée
même de « maison » devient une blague cruelle.
Ces endroits étaient assez déprimants dans les années 1960 et 1970,
alors que les personnes qui y vivaient pouvaient au moins se présenter à
des emplois payés pour assembler des produits et gérer leur
distribution. Maintenant, ces gens n’ont même plus cela pour donner un
peu de sens à leur existence, ou en couvrir les coûts. L’espace public
n’a jamais été développé dans les banlieues pour automobile, et les
tristes restes ont été remplacés par des substituts sous forme d’ersatz,
comme les centres commerciaux maintenant en train de mourir. Tout ce
qui reste d’une nature associative publique et humaine a été repoussé
dans une sorte de boîte informatisée avec un écran dessus.
Les masses non-élites n’ont pas appris la dure leçon de notre temps.
Le virtuel n’est pas un substitut adéquat à l’authentique, alors que les
élites qui créent toute cette merde vicieuse dépensent des millions
pour se retrouver ensemble en face-à-face dans les Hamptons et à
Martha’s Vineyard pour se dire combien ils sont merveilleux de fournir
toutes ces émissions sociales artificielles et ces outils incroyables
à leurs clients qui les payent.
L’effet de cette relation dynamique, jusqu’à présent, a été
puissamment soporifique. Vous pouvez priver les gens d’une vraie maison
pendant un certain temps, et leur donner des amis virtuels à la
télévision pour projeter leurs émotions, et vous organiser pour leur
vendre des voitures grâce à une escroquerie financière et une autre pour
les maintenir en mouvement sans attention autour d’un paysage
complètement profané en leur donnant la fausse impression qu’ils vont
quelque part – mais nous en sommes maintenant au point où les gens
ordinaires ne peuvent même plus supporter les coûts pour se garder
eux-même en otages de ces conditions dégradantes.
Le prochain grand divertissement pour eux sera l’implosion financière
des élites elles-mêmes, car les forces physiques qui gouvernent
vraiment le monde ont enfin surmonté toutes les ruses et les stratagèmes
des élites qui ont joué avec l’argent. Les observateurs professionnels
ne se fatiguent jamais de dire que le gouvernement ne peut pas manquer
d’argent (car ils peuvent toujours en imprimer plus) mais ils peuvent
certainement détruire la valeur de cet argent et détruire la confiance
consensuelle qui lui permet de fonctionner comme de l’argent.
C’est exactement ce qui va arriver à la fin de l’été lorsque le
gouvernement va manquer de cash et que le congrès va se trouver
totalement paralysé par l’animus
du parti pour régler le problème du plafond de la dette qui désactive
les nouveaux emprunts. Les élites peuvent se la couler douce dans leur
maison des Hamptons et de Martha’s Vineyard d’ici là, mais les prochains
étés peuvent ne jamais être les mêmes pour eux.
L’État profond peut gagner sa guerre contre le pathétique président
Trump, mais il ne gagnera aucune guerre contre les impératifs de
l’univers et la façon dont il s’exprime dans la véritable évaluation des
choses. Et quand le moment de la clarification arrivera – l’instant de
la découverte cosmique des prix – les élites sans cervelle devront
vraiment s’inquiéter de la valeur de leur tête.
James Howard Kunstler
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