Article original de Andrew Korybko, publié le 11 Mars 2017 sur le site Oriental Review
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Les Autrichiens ont récemment appelé les Balkans occidentaux, la Géorgie et l’Égypte à construire des centres de « réfugiés » et
d’immigrants pour le traitement et potentiellement le logement indéfini
des centaines de milliers d’individus non occidentaux qui entrent dans
l’UE.
M. Sebastian Kurz a déclaré au journal allemand Bild am Sonntag : « Ce
n’est pas très important de savoir exactement où ils [les centres]
seront. Ce qui est important, c’est que ces pays assureront la
protection et que les gens qui tenteront illégalement d’arriver en
Europe seront renvoyés là-bas. » Ce qu’il dit essentiellement,
c’est que ces régions périphériques en dehors de l’UE se transforment en
ce que les Serbes, par leur Premier ministre Aleksandar Vucic, ont déjà appelé des « parkings » pour les réfugiés et les immigrants, quelque chose dont il a juré qu’il ne laisserait jamais son pays le devenir.
Les zones que Kurz a pointées – la Géorgie, les Balkans occidentaux
et l’Égypte – sont importantes parce que deux des trois veulent adhérer à
l’UE, tandis que la dernière, l’Égypte, est la voisine beaucoup plus
stable de la Libye, d’où partent de nombreux migrants africains sur la
route de leur dangereux voyage vers l’UE. Alors que tout le monde
connaît les routes libyennes et balkaniques, l’inclusion de la Géorgie a
laissé de nombreuses personnes se grattant la tête, car il n’y a pas eu
de rapports sur les migrants qui entrent dans l’UE à partir de ce
territoire.
Ce que nous pouvons en conclure, c’est que l’UE veut seulement
déplacer le fardeau des immigrants et le transférer en dehors du bloc à
des partenaires et/ou aspirants à une place dans l’UE. La question est
une patate chaude politique dans l’UE et a déjà divisé la société, mais
elle est encore plus prononcée dans les Balkans occidentaux, qui ont dû
faire face à plus d’un million de personnes qui ont traversé
leur territoire au cours des deux dernières années. La Géorgie, qui n’a
pas eu à éprouver ce genre de problèmes, ou du moins pas encore, n’est
pas désireuse de s’impliquer. Quant à l’Égypte, c’est de loin le plus
grand et le plus puissant des pays que Kurz a cités, mais il est
également très douteux que Sisi veuille que le sien se transforme en ce
que Vucic a qualifié de « zone de stationnement ». Alors que
les étrangers pourraient se demander pourquoi il ne serait pas d’accord
pour cela en échange de subventions économiques et d’autres sortes
d’avantages, il n’en demeure pas moins que même si l’Égypte est un pays
arabe en Afrique du Nord, sa culture est différente de celle des Libyens
ou Africains subsahariens; et avec un Sisi appliquant une politique
très dure contre le terrorisme, il n’est pas certain qu’il prendra le
risque de permettre à un groupe de migrants étrangers de s’installer
dans sa société, encore moins pour satisfaire l’UE.
La situation est que l’UE sait que ses plans de réinstallation des
immigrants précédents n’ont rien de positif et n’ont fait qu’accroître
le clivage croissant entre les membres du bloc. Maintenant l’UE essaie
de proposer de l’argent à d’autres en les attirant par des incitations
financières et, dans le cas des Balkans occidentaux et de la Géorgie,
par des pressions institutionnelles en faisant valoir que c’est leur
devoir d’aspirants à l’UE. Ce plan n’aboutira probablement pas dans son
intégralité, même s’il est possible qu’un ou quelques-uns des pays
proposés puissent finir par l’accepter même si ce n’est qu’au travers
d’une participation partielle et limitée. Cependant, ce serait en soi
extrêmement problématique, car cela constituerait un précédent troublant
dont l’UE abuserait certainement, et ne plus tenir compte de demandes
supplémentaires après avoir déjà rempli certaines d’entre elles pourrait
provoquer une crise politique entre Bruxelles et son ou ses
partenaire(s) « parking ».
C’est en effet ce qui est arrivé avec la Turquie, qui a accepté un
accord d’immigration avec l’UE au début de l’année dernière, mais qui
est extrêmement fragile et Ankara l’a déjà utilisé comme une arme
politique. C’est peut-être la raison pour laquelle le ministre
autrichien des Affaires étrangères a visiblement laissé la Turquie hors
de sa liste d’États périphériques de « stationnement », mais
aussi parce qu’il ne s’attend pas à ce que les autres pays qu’il a
énumérés soient suffisamment forts ou incités à tirer parti d’un accord à
venir, considérant leur avantage stratégique majeur à collaborer avec
l’UE.
Andrew Korybko
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