mardi 12 janvier 2016
De Mars à l’Agro-business
Article original de James Howard Kunstler , publié le 28 Décembre 2015 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Le très gros morceau de l’émission 60 Minutes de la nuit dernière était que le dernier film Star Wars a passé la barrière du milliard de dollars de profit après une semaine de projection. Cela dit, tout ce que vous devez savoir sur une société qui se noie, y compris sur l’état des médias officiels.
La cerise sur le gâteau, la semaine dernière, était l’exploit de la compagnie SpaceX d’Elon Musk avec la récupération du premier étage de sa fusée Falcon 9 qui devrait (théoriquement) être recyclé, réduisant ainsi grandement le coût des tirs pour envoyer des choses dans l’espace. Les médias s’en sont emparés sans retenue car derrière cet exploit vient la quête héroïque de M. Musk pour poser des humains sur Mars. Notre culture a perdu beaucoup au cours des quarante dernières années, mais parmi les pertes les moins reconnues, il y a celle de nos facultés critiques. Nous sommes devenus une nation infantilisée.
Flash spécial: on n’ira pas sur Mars. Malgré les éloges pour la fiction parfaitement rationalisée de Ridley Scott, Seul sur Mars (basé sur un roman d’Andy Weir), tout voyage humain vers la planète rouge serait un voyage à sens unique. Quoi qu’il en soit, tout cela pose la question : pourquoi sommes-nous si désireux de voyager vers une planète morte sans aucun des éléments nécessaires à la vie humaine quand nous ne parvenons pas à gérer la vie humaine sur une planète superbement équipée pour nous soutenir?
Réponse : Parce que nous sommes perdus dans le ravissement du techno-narcissisme. Qu’est-ce que je veux dire par là ? Nous sommes convaincus que toutes les conséquences imprévues de notre brève orgie techno-industrielle peuvent être résolues par… plus et mieux de technologie ! Notez que ce récit est servi à une société maintenant tenue en otage par des images sur de petits écrans, et par des gens qualifiés qui, de plus en plus, agissent comme si ces écrans étaient devenus la nouvelle demeure de la réalité. N’est-ce pas psychotique ?
Tout cela n’est que rodomontades sur les gloires de l’épopée spatiale et se produit au détriment de l’attention prêtée à nos problèmes sur cette planète, y compris la question existentielle de savoir à quel point nous nous nous suicidons en brûlant les combustibles fossiles qui alimentent nos activités techno-industrielles.
Personnellement, je ne crois pas du tout qu’un accord international pourra régler ce dilemme. Mais ce qui va bien fonctionner, et c’est sur quoi je compte bien, c’est un crash financier qui conduira à une réorganisation forcée de l’activité humaine à une échelle inférieure d’activité technologique.
La question supplémentaire est de savoir à quel point l’épreuve de cette transition sera vraiment dure, la réponse étant qu’il est largement en notre pouvoir de rendre ce voyage moins pénible. Mais il faudrait un dévouement à des objectifs clairs et un travail acharné pour modifier tous nos arrangements actuels, comme renoncer à ces fantastiques distractions enfantines sur l’espace et la technologie.
Par exemple, rêver de fusées vers Mars est facile à faire en comparaison de la transition du racket sans avenir de l’agro-business vers d’autres méthodes d’agriculture qui ne détruisent pas les sols, les nappes phréatiques, les écosystèmes et les organismes [et les êtres humains, NdT]. C’est plus facile que de réarranger nos vies dans notre environnement pour que nous ne soyons plus otages de l’automobilisme pour aller partout sous n’importe quel prétexte. C’est plus facile que d’éduquer les gens pour leur apprendre, à la fois, à penser et à développer de véritables compétences pratiques qui ne dépendent pas de machines complexes et d’appareils à propulsion électrique.
Mais nous ne sommes pas intéressés, et voilà pourquoi nous allons être traînés en hurlant et à coups de pied vers un avenir très différent, qui ne sera pas une balade en fusée vers le nouveau centre commercial sur Mars. Je ne suis pas religieux, mais peut-être y a-t-il quelque chose comme la Providence au travail nous ensorcelant avec ces fantasmes d’espace juste en fin d’année, ce qui nous permet d’oublier toute cette merde stupide afin de nous préparer pour les tribulations à venir des secteurs bancaire et politique en 2016. En parlant de cela, la semaine prochaine, je vais publier mes prévisions pour les douze mois de montagnes russes devant nous.
Happy New Year à vous.
James Howard Kunstler
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