Article original de James Howard Kunstler, publié le 25 Avril 2016 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr
Le printemps se déploie enfin dans toute sa beauté, et
Hillary peut se rendormir comme la matriarche des crapauds, la voie vers
son trône maudit dégagée après avoir avalé Sanders, le roi-souris.
(Elle oublie qu’il y a des millions de souris sous le chaume, y compris
de nouveaux rois-souris en attente.) Et Trump, avec son sourire de
grenouille-taureau jette maintenant son regard maléfique sur les deux
moucherons restants encerclant son nénuphar. Oui, quelle semaine magique
quand le monde explose de couleurs et de fleurs, la vie de notre nation
semble être celle d’un conte de fées.
Depuis des semaines, alors que nous nous sommes habitués à l’air doux
et à un monde qui reverdit, enlevant nos manteaux et oubliant nos
soucis, les tempêtes de l’été et la vie de la nation passent du conte de
fée à la BD gore. Clinton et Trump sont de parfaits représentants des
forces naissantes avançant vers une sorte de guerre civile, racontée
dans une bande dessinée intitulée Amérique.
Clinton incarne parfaitement la forteresse du statu quo, y compris et
en particulier sa garde prétorienne de grands-mères des ghettos noirs,
donnant à Hillary la fausse apparence d’une sorte de droiture quand,
vraiment, elle n’a rien à offrir à la grande crise de la virilité noire,
mise en prison par les anciennes règles paralysantes de la politique
sociale du gouvernement fédéral, avec les peines extrêmes d’un
paternalisme forcené. Sinon, derrière les murs de pierre de sa
forteresse du statu quo, elle cache des conseils privés des
nécromanciens de Wall Street, et la fortune dont ils l’ont aidée à
remplir les coffres de la Fondation Clinton.
Tout cela pour dire que Hillary représente les forces qui veulent
garder les choses comme elles sont: un racket rampant. Ce qui peut
mettre à terre son triomphal truquage, c’est la manifestation soudaine
des rackets s’effondrant sous leur propre poids, avec un ensemble de
probabilités terribles attendant de se produire, allant des émeutes à la
Convention démocrate de Philadelphie, à un accident sur les marchés
financiers, truquant tous les prix dans le but de canaliser les gains de
carry-trade dans les East Hampton [zone de résidences select près de New York, NdT].
Regardez comment elle croasse son triomphe pour la Loi sur les soins
abordables, comme si c’était une bonne chose que les Américains doivent
débourser 10 000 dollars par an pour une couverture médicale qui ne se
déclenche qu’après avoir payé une franchise de 6000 dollars en frais.
(Oubliant un instant que les coûts sont une hallucination d’un système
de pillage conçu pour des somptueux salaires à six chiffres, plus les
primes, pour les maestros administrant le système hospitalier.) Cette
femme est une fraude démoniaque.
En termes de comparaison, Trump n’est pas beaucoup mieux, juste un
ornement de capot sur la mécanique chancelante que l’Amérique est
devenue. Mais au moins, il reconnaît que les rouages ont besoin d’une
refonte complète, même s’il peut à peine concocter une liste cohérente
de ce qu’il faut faire ou nommer les mécaniciens qui pourraient être en
mesure de réparer le problème. Et, bien sûr, une large frange
d’Américains, dont les vies ressemblent également à ces mécaniques
brinquebalantes, voient d’un œil très sympathique les radiations de
Trump.
Par exemple, je suis d’accord que la nation a besoin d’agir sur
l’immigration, à la fois sur le problème des immigrés clandestins et sur
la limitation des quotas de nouveaux arrivants légalement admis. La
gauche, plongée dans ses histoires sentimentales de doux rêveurs et sa nostalgie pour le roman d’Ellis Island
de 1904, ne peuvent concevoir aucune raison pour laquelle la nation
pourrait bénéficier, au moins, d’un délai sur les invitations, juste
pour souffler.
L’idée sape leurs fantasmes de sauver le monde. Dans mon
petit coin d’Amérique, l’usine de puces d’ordinateur gérée par Global
Foundries (appartenant à l’émirat de Dubaï) vient de mettre à pied la
majorité de sa population active de techniciens américains du cru, pour
les remplacer par des techniciens étrangers avec des visas H1B, créant ainsi un grand nombre de nouveaux électeurs pour Trump parmi les mis à pied, cela à juste titre, je pense.
Vraiment, qui dit que nous devons inviter tous les lutteurs d’autres
parties du monde, où les efforts sont plus difficiles? Qu’ils améliorent
la productivité de leurs propres nations. Est-ce que les citoyens déjà
ici n’ont pas le droit de mettre fin à l’afflux d’immigrés pour faire le
point sur la situation de notre nation pour une période donnée? Si
seulement Trump pouvait parler clairement de ces questions, au lieu
d’émettre simplement des menaces grossières et plutôt stupides.
Profitez de cette accalmie de cette fin d’avril. Utilisez ce moment
pour vous préparer et peut-être sortir de l’enfer des marchés
financiers, alors qu’il en est encore temps. Je pense que vous allez
voir que des choses s’animent beaucoup, alors que la chaleur de l’été
monte et que les sauterelles sortent de leur long sommeil souterrain de
dix-sept ans, en nuées effrayantes.
James Howard Kunstler
Pour le roi-souris …
Note du traducteur
Ouhhhhh, The Kunstler vient de changer de cap, 10° à tribord. Pas encore une franche et totale abattée, ni un virement lof pour lof, mais même s'il continue de détester Trump pour l'ensemble de son œuvre, magouilles immobilières en tête, il commence à percevoir et à écrire qu'il est peut-être le seul à pouvoir renverser la table. Je jubile. Je désespérais de voir cet auteur visionnaire ne pas comprendre la chance historique d'obliger l’Amérique à s'arrêter un moment pour contempler son œuvre depuis 200 ans. C'est bien un grand monsieur de la littérature américaine, un esprit qui pense, capable de dépasser ses tabous.
Comme le disait si justement Madeleine Albright : «Nous pensons que ça vaut la peine» ! Je pense aussi qu'il y a un paquet d'Afghans, d'Irakiens, de Libyens et maintenant de Syriens, avant peut-être les Iraniens, les Chinois ou les Russes, qui aimeraient bien que la machine de guerre des oligarchies occidentales cale, trébuche. Bien sûr Trump, c'est peut être un gros crapaud pas beau, bien sûr qu'il n'a aucun programme, aucune équipe, mais ce n'est pas le rôle que l'Histoire lui réserve s'il va jusqu'au bout. Son rôle s'est de faire asseoir l'éléphant ! Plus bouger ! Même pas un poil de cul ! Alors nous prendrons le temps de contempler tous ensemble le champ de ruines laissé derrière nous... et aussi quelques technologies sympas.
Que la réalité réelle prenne le dessus sur la réalité fabriquée !
On sent que même si c'est loin d'être gagné, c'est possible, et même si Trump n'est pas aussi cooooooooool qu'Obama qui nous avait fait rêver le temps d'une élection, il n'y aura que le résultat qui compte. Les élites sont fatiguées, elles sont même épuisées. Elles se font ouvertement insulter partout où elles s'aventurent encore. Elles n'ont plus d'autre solution que la fuite en avant vers une nouvelle guerre, avant que la noyade de l'économie par les liquidités ne finisse de scier la branche qui les soutient. Les gars, les gars, hé là-haut, lâchez prise, laissez aller, on sait que c'est dur. Deux cent cinquante ans de règne sans partage, c'est long, une éternité. Laissez-nous reprendre la main en douceur, tant que c'est possible et que l'on peut encore convertir l'économie mondiale à un niveau de suffisance gérable, avant que les balles ne se mettent à siffler autour de nous, et avant que les bourreaux de tout poil ne sortent de l'ombre.
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