mercredi 27 juillet 2016

Sombres perspectives

Article original publié par James Howard Kunstler, le 18 Juillet 2016 sur le site kunstler.com
Traduit par le blog http://versouvaton.blogspot.fr


 
J’étais dans les rues de Chicago en 1968 lors de la Convention démocrate. C’était seulement quelques mois après que Bobby Kennedy et Martin Luther King eurent été abattus. L’establishment, comme nous l’avons appelé à l’époque, était prêt à nommer le vice-président Hubert Humphrey, qui avait commencé à Washington comme un activiste progressiste du Midwest, mais qui était maintenant largement perçu par les jeunes hippies de l’Amérique comme un larbin et un politicien À-VENDRE aux forces du mal et de la guerre du Vietnam en cours.


Je n’étais pas exactement un manifestant, plus un proto-journaliste. J’étais là pour assister à un événement historique. Ce fut une période sauvage de trois jours avec beaucoup d’affrontements à Lincoln Park et Grant Park, et enfin, sur Michigan Avenue, la terrible nuit d’apothéose de Humphrey, où les choses ont été particulièrement laides et où les grenades lacrymogènes ont volé. Mais c’était le jeu. Personne n’a été tué par la police, ou vice-versa, et nous sommes tous retournés au collège (mon école SUNY coûtait 500 dollars par an à l’époque, en passant). Nixon était le prix de consolation.
À l’époque, c’était le style d’assassiner des dirigeants politiques. Aujourd’hui, il est à la mode d’assassiner des policiers. Il est difficile d’imaginer des cibles plus faciles. Lorsque des problèmes se préparent dans les rues de nos jours, ils sont là : juste en face, faciles à distinguer dans leurs uniformes. C’était exactement l’image sur la première page du New York Times d’aujourd’hui : la mince ligne bleue à Cleveland, où la convention républicaine se réunit cette semaine pour désigner le deus ex machina doré Donald Trump. Il y a peu de choses dans la vie que l’on peut prédire avec certitude, mais étant donné les graves événements de ces dernières semaines, il est difficile de voir comment un accident mortel par balle pourrait être évité à la convention républicaine 2016.

Peut-être que la police va simplement décider de rester à l’intérieur et ne pas se présenter en tant que cible. Probabilité : faible. Les officiels de l’Ohio parlent de suspendre la loi open carry pour la durée de l’événement. Ce serait probablement une meilleure option que, disons, une foule armée brandissant des fusils à répétition. Mais même si cette loi est suspendue, il est facile d’imaginer des gens portant des armes dans un étui de guitare ou un sac à dos. Le mème de tuer est déjà là, comme les esprits mortels qui flottaient hors de la boîte de Pandore.

Peut-être qu’il est temps pour le Président Noir, M. Obama, de sortir et de dire à la population noire que leurs griefs contre la police sont forgés de toutes pièces, dirons-nous : que Alton Sterling n’était pas un honnête citoyen mais un condamné félon portant une arme à feu, et que nous ne connaissons toujours pas les faits sur ce que Philando Castille faisait quand il a été abattu dans sa voiture, et il pourrait bien revenir en arrière et secouer la poussière de fée entourant l’incident de Michael Brown (Ferguson), l’incident de Tamir Rice (arme à feu jouet) et toutes les autres situations ambiguës de ces dernières années qui ont suscité la crise actuelle autour des relations raciales.

Sinon, cela va commencer à ressembler beaucoup à une guerre raciale en Amérique. Les dirigeants politiques et les leaders d’opinion ont jusqu’ici échoué à mener à bien la légendaire conversation sur la race, qui est un fantôme de la vie nationale. C’est apparemment trop douloureux pour être réellement entrepris. Les prétextes à ce sujet sont devenus ridicules – par exemple la récente sortie d’Hillary Clinton que « les Blancs doivent reconnaître leurs privilèges », et les appels idiots à « aller ensemble ».

Les deux communautés noires et blanches en Amérique (en particulier l’Amérique libérale d’HRC) ferait mieux de se poser la question : pourquoi avons-nous encouragé l’idée que les Noirs ne doivent pas se donner la peine d’essayer de s’assimiler dans la culture commune de la nation (enfin ce qu’il en reste) ? Voilà ce que la diversité culturelle imbécile fait, accompagnée de l’idée encore plus stupide que l’inclusion est nécessaire pour ceux qui choisissent de ne pas être inclus dans cette culture commune. Les dégâts de cinquante ans de ces shibboleths devrait être évidents maintenant. Mais les émotions nous transportent au-delà de l’auto-examen d’un certain côté. Peut-être que la conversation sur la race ne peut avoir lieu qu’après une plus grande convulsion, quand les gens tomberont finalement malades de ce que leur malhonnêteté a semé.

James Howard Kunstler

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